Par MARC FROMAGER,
directeur de l'Aide à l'Église en détresse (AED).
ON HESITE entre la Visitation et la Pentecôte pour décrire les journées merveilleuses où le pape est venu en France nous affermir dans la foi. Mais une phrase de Benoît XVI m'a étonné plus que tout : Aujourd'hui, c'est surtout en vue d'une véritable libération spirituelle qu'il convient d'œuvrer. Même si le Saint-Père prend soin de préciser qu'il s'agit de l'esclavage de la peur et du péché, la question se pose : la France va-t-elle si mal que ça ?

Le hasard du calendrier fait que l'AED (Aide à l'Église en Détresse) s'apprêtait à publier (le 23 octobre) un Rapport sur la liberté religieuse dans le Monde. Le rapprochement sémantique entre libération et liberté étant immédiat, il apparaissait opportun de valider l'éventuelle proximité entre les deux expressions. Or, par définition, s'il y a besoin de libération, c'est bien que la liberté n'y est pas. Fallait-il en conclure que la liberté religieuse était défaillante en France ? Ou peut-être menacée ?
À la base de tous les droits
Tout le monde s'accorde aujourd'hui pour dire, à la suite de la belle Déclaration universelle des droits de l'homme, dont nous allons fêter le soixantième anniversaire, que la liberté de religion est un bien précieux. Pour mémoire, l'article 18 précise que toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seul ou en commun, tant en public qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et l'accomplissement des rites .
L'Église catholique n'est pas étrangère à cette évolution, elle qui a théorisé la première le respect absolu de la conscience, en particulier depuis Thomas d'Aquin (elle a toujours interdit les baptêmes forcés ou le mariage sous la contrainte). Mais c'est au XXe siècle, durant le concile Vatican II, qu'elle a précisé sa conception de la liberté religieuse avec Dignitatis humanæ, une déclaration pontificale et non une constitution, en raison d'un manque d'accord entre les pères du concile. C'était sans doute pour certains d'entre eux la porte ouverte à un relativisme religieux mortifère, alors que le concile, et on l'oublie trop souvent, prenait la peine de rappeler que cette unique vraie religion, nous croyons qu'elle subsiste dans l'Église catholique et apostolique à qui le Seigneur Jésus a confié le mandat de la faire connaître à tous les hommes, lorsqu'il dit aux apôtres : "Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit".
Ce droit à la liberté de religion, l'Église lui reconnaissait alors une importance prééminente, ayant son fondement dans la dignité même de la personne humaine. À la suite de Jean Paul II, Benoît XVI définit ce droit comme le droit fondamental qui est à la base de tous les autres droits de l'homme.
Or ce droit fondamental est aujourd'hui l'un des moins respectés. Les principaux motifs de négation de la liberté religieuse sont religieux ou idéologiques, ce que reflète de manière significative la liste des pays les plus concernés : Arabie Saoudite, Irak, Iran, Pakistan, Soudan (islam), Inde (hindouisme), Corée du Nord, Chine, Vietnam (communisme). Cette négation ou restriction peut être le fait des États mais aussi de groupes extrémistes.
L'enjeu est ni plus ni moins que la paix : Il ne peut y avoir de paix sans compréhension et sans coopération entre les religions. Il ne peut y avoir de compréhension ni de coopération entre les religions sans liberté religieuse affirme Mgr Mamberti, "ministre des Affaires étrangères" du Saint-Siège, ce que l'actualité démontre chaque jour davantage.
Et la France ?
Comme la plupart des sociétés occidentales, notamment européennes, notre pays est confronté dans ce domaine à deux défis majeurs, que nous allons évoquer : l'intégration de l'islam et une culture antagonique envers le christianisme. Se rajoute, pour la France, son histoire particulière liée à la violence antichrétienne de la Révolution.
Même si la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 (réaffirmée dans le préambule de l'actuelle Constitution) stipule dans son article 10 que nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses , force est de constater, comme l'a admis Nicolas Sarkozy dans son discours du Latran, que la France avait été soupçonneuse envers les religions, et c'est franchement le moins qu'on puisse dire. Sans même s'étendre sur les massacres d'ecclésiastiques, la confiscation des biens de l'Église ou encore l'opération de dénaturation de l'Église qui a consisté à créer une Église nationale (notons que là aussi, la France aura servi de modèle à une grosse part des persécutions antichrétiennes du XXe siècle), il apparaît clairement que la question de la place de l'Église en France est restée, jusqu'à nos jours, un sujet délicat.

 

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