CE LIVRE N'A PAS ETE TRADUIT en français mais mérite la plus grande attention. Ses options, surprenantes pour un auteur américain, obligent à une remise en cause de nombre d'idées reçues même dans les milieux chrétiens.

Nous en résumons ci-après les points principaux sans commentaires particuliers, les vues exprimées nous paraissant souvent assez justes et en tout cas stimulantes.

La thèse de Robert P. Kraynak est double et apparemment paradoxale. D'un côté, le christianisme est selon lui nécessaire à la survie (à terme) de la démocratie, notamment pour fonder sa revendication principale, la valeur et dignité de chaque personne ; mais de l'autre, ce n'est pas, de soi, une religion libérale ou démocratique, et elle ne fait pas même de la politique sa plus haute priorité. Le premier point implique qu'il ne faut pas exclure la religion de la sphère publique, le second qu'il ne faut pas croire qu'il est facile de réconcilier la foi avec les principes et la pratique de la démocratie moderne. Sur le premier point, il montre qu'il est contradictoire de proclamer des valeurs suprêmes (comme les droits et la dignité de chacun) tout en niant qu'une connaissance objective du Bien soit possible. Mais inversement, sur le second point, s'il est vrai que la Bible dit que l'homme est fait à l'image et ressemblance de Dieu, cela n'implique pas de soi la démocratie et les droits de l'homme : la plupart des grands théologiens du passé pensaient même le contraire. Il faut donc reconnaître un dilemme troublant : la démocratie libérale a besoin de Dieu, mais Dieu n'est pas aussi libéral ou démocratique que nous voudrions qu'Il soit .

 

Fondement idéologique de la démocratie moderne

 

La tradition chrétienne en politique est basée sur la reconnaissance de l'existence des deux cités, et fondée sur la vertu de prudence. La cité des hommes est examinée notamment en regard du droit naturel. Actuellement au contraire, la plupart des théologiens pensent que, en politique, le christianisme implique la démocratie : ils ont donc supprimé le hiatus entre les deux cités, notamment du fait de la plus grande sensibilité à l'époque moderne aux exigences de la dignité humaine comprise à travers le prisme de l'idéologie moderne.

La démocratie antique n'était pas fondée sur des principes philosophiques, mais sur des pulsions instinctives et des croyances populaires : solidarité de classe, patriotisme tribal, masculinité, etc. La notion d'égalité entre citoyens libres qu'Aristote ou Platon utilisaient pour décrire cette démocratie en est une version abstraite ; mais ni les Athéniens ni d'autres ne l'ont jamais vécue comme valeur universelle. Et les philosophes, eux, étaient presque tous hostiles à la démocratie. Dans l'égalité, ils voyaient un nivellement.

En revanche ce qui est nouveau dans nos sociétés, c'est une passion pour la justice qui a elle-même un fondement tout nouveau : la notion de droits de l'homme comme principe universel. Le fondement théorique du nouveau système lui est donc essentiel. Le degré d'idéologie des trois révolutions anglaise, américaine et française est variable, mais elle est en facteur commun. Son fondement est dans la dignité de l'homme, comportant une autonomie de choix et de volonté se traduisant sur le terrain personnel comme politique. Se déterminer librement est jugé plus important que s'incliner devant Dieu (ou la nature). Les droits sont des armes contre l'autorité, pour l'empêcher de s'imposer, ou pour en exiger quelque chose, mais en même temps c'est une revendication d'autonomie mentale, de jugement indépendant supposé rationnel.

Il en est de même du principe d'égalité politique : on le fonde comme Lincoln sur l'idée que chacun a la capacité de se gouverner.

 

[Fin de l'extrait] ...

 

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