La Justice souffre en France de deux maux : la politisation inadmissible de nombreux magistrats et singulièrement ceux du Syndicat de la magistrature qui se comportent plus souvent en militant qu'en juges et l'encombrement inouï des cours et tribunaux faute de moyens. Il n' n'y a pas plus de magistrats en France qu'en 1900 alors que les Français sont devenus beaucoup plus procéduriers et que la délinquance et la criminalité ont explosé.

 

Cependant quelques rouages de la machine fonctionnent à peu près bien, notamment les cours d'assises en dépit de quelques erreurs judiciaires manifestes.

La bonne tenue des cours d'assises tient sans doute à la qualité des magistrats (président et avocat général), mais surtout à la présence de jurés populaires, (neuf aujourd'hui). Sélectionnés d'abord par niveau censitaire (sur le revenu), puis sur des listes établies par les gendarmes et comprenant essentiellement des notables : maires, conseillers municipaux, directeurs d'écoles propriétaires ruraux. Une sélection qui n'a pas manqué de soulever des critiques. On en est venu à dire :  C'est une justice de notables et c'est pourquoi les arrêts sont si sévères. Désormais ce sont des jurés, tirés au sort sur des listes électorales, donc plus populaires qui participent au cours d'assises. Et là surprise les arrêts sont devenus souvent beaucoup plus sévères !

Mais quoiqu'il en soit, les cours d'assises fonctionnent plutôt bien. Elles ont pour vertu de représenter souvent le bon sens, la réalité des choses et tout cas  la volonté du peuple français  venant tempérer le pointillisme et la rigidité de la loi pénale... A condition que cette volonté démocratique, au nom du peuple français, ne soit pas bafouée par les innombrables JAP (juges d'applications des peines) qui peuvent démolir en deux lignes un arrêté définitif de cour d'assisses (de même que les juges des libertés et de la détention plus sensible à la liberté qu'à la prison).

L'importance des jurés tient aussi au fait qu'après de longues journées d'audience, il ne leur est pas demandé de se décider sur des preuves même si elles existent mais sur leur intime conviction, sans avoir besoin de la motiver.

Dans la nouvelle réforme, une de plus, Michel Mercier, ministre de la justice, entend que désormais la cour d'assises motive ses décisions. Idée surprenante, en effet, il faudrait faire une synthèse de débats contradictoires qui peuvent durer des mois, de témoignages, de déclarations diverses, d'expertises, d'éléments du droit. Si en plus les faits sont multiples et commis par plusieurs auteurs, quel magistrat de la cour déjà submergé de travail pourra t-il rédiger un tel pathos et pourquoi ? Et où se placera l'intime conviction des jurés qui, précisément, ne tient qu'à des faits précis matériels ?

Mais surtout le Garde des sceaux veut imposer la présence de jurés dans les chambres correctionnelles. Profonde utopie ! Certes il s'agit de proposer une justice plus proche des gens, mais que comprendront de braves gens à l'extrême complexité des lois, il faudra trouver (où ?) des milliers de jurés dans toute la France, les payer, cela coûtera une fortune, bouleverser le rythme des audiences, ce sera une jolie pagaille ! Une fois encore, à part la démagogie du projet, on ne voit pas où se situerait l'intérêt des justiciables. Il y a déjà beaucoup trop de lois, certaines inutiles, d'autres inapplicables.  Cessez d'emm...les Français  disait déjà le Président Pompidou. Il suffirait d'appliquer les lois existantes, de s'en tenir aux codes qui prévoient aussi bien le renvoi libre que les peines entre plancher et plafond et de demander, enfin, le changement de comportement de certains magistrats. En s'en tenant à ce qui devrait compter d'abord : non pas le droit des coupables mais la protection de la société.

 

 

 

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