La réforme du congé parental reportée sine die
Article rédigé par Anne-Laure Le Borgne, le 19 mars 2010

Chargé depuis l'été dernier de réfléchir aux possibilités de réforme du congé parental, le Haut-Conseil de la Famille (où sont représentées des organisations syndicales, familiales et patronales) a rendu mi-février un avis qui a eu pour effet d'ajourner la réforme promise par le gouvernement.

Depuis le mois de juillet, avec le rapport Tabarot notamment, les pistes s'étaient rapidement orientées vers un raccourcissement de l'indemnisation du Complément de libre choix d'activité : accusé d'être à l'origine d'un chômage accru chez les femmes, il était question de le limiter à un an et de mieux le rémunérer (cf. Libertepolitique.com, 16 septembre).
Mais la note finalement remise par le HCF est singulièrement nuancée sur le sujet : si elle détaille les différents scénarios possibles et leur impact social et financier, elle précise que ces derniers sont présentés successivement, sans que leur ordre reflète une quelconque hiérarchie des priorités ou des préférences du secrétariat du HCF . On y trouve en effet une série de précautions qui sont autant de marques de prudence... ou d'hésitation :

  • Pas de données claires sur le lien entre congé parental et chômage des femmes. Le risque de handicap de carrière des allocataires du CLCA à taux plein n'est pas évaluable dans l'état actuel des données disponibles. [...] Il est d'ailleurs malaisé d'analyser l'incidence de l'arrêt d'activité sur l'évolution des carrières, en raison de la difficulté d'isoler le facteur arrêt d'activité parmi l'ensemble des caractéristiques sociales, économiques, psychologiques et familiales des mères concernées. Rappelons qu'une étude d'impact prévue par la loi de financement de la Sécurité sociale de 2009 est toujours attendue sur ce sujet...
  • Maintien du congé parental d'éducation de 3 ans. Le raccourcissement éventuel de la durée de service du CLCA ne doit pas entraîner la réduction parallèle de la durée du congé parental d'éducation [1] ... ceci pour conserver aux parents jusqu'aux 3 ans de l'enfant la garantie de retrouver leur emploi ou de recourir au temps partiel : mais quelle cohérence entre d'un côté le maintien de la durée du congé parental d'éducation et de l'autre la réduction de la durée d'indemnisation du CLCA ? Quel signal pour les familles ?
  • Nécessité d'une démarche progressive. Comme une réforme qui diminuerait sensiblement la durée de service du CLCA aurait des conséquences importantes dans l'organisation de vie des familles, sur le marché du travail et sur la demande de modes d'accueil pour les jeunes enfants, il serait prudent d'adopter une démarche progressive.

Voilà qui est clair : le HCF émet en réalité une forte mise en garde sur une réforme qu'il juge trop rapide ou trop brutale.
Malgré un ultime discours de Nicolas Sarkozy le 13 février revenant sur la nécessité de raccourcir le congé parental parfois à l'origine d'un immense gâchis pour les femmes concernées , Xavier Darcos a estimé le 16 février qu'il n'y avait pas de consensus sur une éventuelle réduction de la durée du congé parental, et que par conséquent il ne souhaitait pas en faire une priorité immédiate . En revanche, a ajouté le ministre du Travail, un consensus existe sur la nécessité d'améliorer la formation professionnelle et l'employabilité des femmes en fin de congé parental .
L'effort portera donc sur le développement et l'aménagement des modes de garde des jeunes enfants (places supplémentaires en crèche, élargissement des horaires d'ouverture, évolution du statut des assistantes maternelles etc.), ainsi que sur l'accompagnement des femmes souhaitant retrouver un emploi après avoir consacré quelques années à leurs enfants.
Voilà donc le congé parental sauvé in extremis... pour l'instant.

[Sources : Hcf-famille.fr ; Elysee.fr ; L'Expansion ; Les Echos]
[1] Le Congé parental d'éducation est régi par le droit du travail : ouvert à tout salarié justifiant d'un an d'ancienneté dans l'entreprise, non indemnisé, il permet au parent d'interrompre son activité jusqu'au troisième anniversaire de l'enfant, en lui garantissant un emploi.

 

 

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