Philippe Pozzo di Borgo : « Soulagez, mais ne tuez pas »
Article rédigé par Philippe Pozzo di Borgo, le 06 mars 2015 Philippe Pozzo di Borgo : « Soulagez, mais ne tuez pas »

DOCUMENT | Philippe Pozzo di Borgo parraine le mouvement « Soulager mais pas tuer » qui rassemble des professionnels et usagers de la santé opposés à toutes formes d’euthanasie et de suicide assisté. Il appelle à un rassemblement le 10 mars à 13h à proximité de l’Assemblée nationale, à quelques heures du débat parlementaire pour demander aux députés de clarifier la proposition de loi Claeys-Leonetti et de s’opposer à toute forme d’euthanasie

LORS d’une conférence de presse ce 5 mars, le mouvement « Soulager mais pas tuer » a analysé les dangers et les ambiguïtés de la proposition de loi Claeys-Leonetti sur la fin de vie, et formulé des propositions pour améliorer ce texte qui sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 10 mars prochain.

Philippe Pozzo di Borgo est intervenu pour expliquer en quoi la liberté de ceux qui veulent l'euthanasie n'est pas séparable de la liberté de ceux qui ne veulent pas mourir, car la mort n'est pas un droit, que le suicide — même assisté — n'est pas un droit.

Liberté politique, qui s’associe à cette initiative, vous propose le texte/vidéo de son intervention, et vous invite à vous joindre au rassemblement du 10 mars.

Philippe Pozzo di Borgo : « Ne touchez pas aux intouchables »

« Je parraine le mouvement ‘’Soulager mais pas tuer’’ car je me sens personnellement concerné et inquiet pour les fragiles et notre société.

J’aurai beaucoup aimé être parmi vous mais je récupère d’une longue année d’hospitalisation. Être ensemble sur cette question est pourtant essentiel, de même qu’il est important sur les questions de fin de vie de se pencher sur les personnes concernées et d’être en relation avec elles, plutôt que de penser résoudre la question par un « droit à la sédation profonde et continue jusqu’au décès », adossée à une loi anonyme.

La pratique de la sédation en fin de vie doit rester exceptionnelle, en ultime recours, car cette sédation annihile toute liberté et interdit toute relation du patient avec les siens ou le personnel médical. Or la relation est le meilleur médicament à l’angoisse de la mort. En paralysant le patient on lui enlève toute chance de s’exprimer et d’être aidé. La loi Leonetti de 2005 avait l’intelligence de maintenir un équilibre subtil entre les soins et le lâcher prise. Par contre, en pensant tout résoudre par un médicament qui « garantirait la mort sous anesthésie», ce nouveau projet de loi décourage la recherche des solutions créatives les plus appropriées au malade et à sa situation.

Beaucoup de personnes revendiquent la liberté de choisir leur mort et argumentent que leur choix est personnel ; elles n’envisagent même pas les conséquences que cette décision peut avoir pour d’autres fragiles encore plus seuls et souffrants. Cette liberté revendiquée par ceux qui disent vouloir être euthanasiés à de lourdes répercussions sur ma liberté et sur celle des plus fragiles et des plus faibles. Si la société dit à celui qui souffre, comme moi, qu’il a le droit d’être euthanasié, c’est comme si elle le disait à moi-même, comme si elle me criait à la figure que notre vie ne vaut plus d’être vécue. On croit respecter un droit, une liberté, on bafoue ma vie, notre vie, à nous autres les très différents et vulnérables.

Ne touchez donc pas aux intouchables, et vous verrez qu’en vous penchant sur eux, en étant en relation avec eux, en les considérant, vous vous réconcilierez avec votre finitude, vous vous sentirez mieux et notre société y trouvera sa dignité. »

EN VIDEO (cliquez sur la photo) :

 

 

 

Pour aller plus loin :
Soulager mais pas tuer
Notre analyse du texte Claeys-Leonetti : L'euthanasie lente, par Bruno Couillaud
Notre dossier "Le droit de la fin de vie"

 

***