Parlement européen

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Résolution du Parlement européen sur les incidences éthiques, juridiques, économiques et sociales de la génétique humaine (rapport Fiori).

Nota : cette résolution a été adoptée par la Commission temporaire de génétique humaine en octobre 2001, mais rejetée en séance plénière, le mois suivant (Ndlr).

 

 

 

Le Parlement européen,

– vu sa décision du 13 décembre 2000 de constituer une commission temporaire sur la génétique humaine et les autres technologies nouvelles dans le secteur de la médecine moderne ,

– vu les documents européens énoncés ci-après :

– le traité sur l'Union européenne (TUE) et en particulier les articles 5, 95, 152 et 163 à 173 du traité instituant la Communauté européenne (TCE),

– la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, telle qu'amendée par le protocole n°11, adoptée à Rome le 4 novembre 1950,

– la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et, en particulier, les articles 1, 2, 3, 8, 13, 21 et 35,

– la directive 95/46/CE relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ,

– la directive 98/44/CE relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques ,

– la décision 99/182/CE du Parlement européen et du Conseil relative au cinquième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (1998-2002) ,

– la décision 99/167/CE du Conseil arrêtant un programme spécifique de recherche, de développement technologique et de démonstration dans le domaine " Qualité de la vie et gestion des ressources du vivant " (1998-2002) ,

– la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative au sixième programme-cadre pluriannuel de recherche (2002-2006) (COM(2001) 94) et la proposition de décision relative aux programmes spécifiques (COM(2001) 279) ,

– ses diverses résolutions et notamment celle du 7 septembre 2000 relatives aux problèmes examinés ,

– le règlement 45/2001/CE du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires ,

– la proposition de directive du Conseil portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail (COM 1999 565) et sa résolution du 5 octobre 2000 ,

– vu les documents juridiques internationaux suivants :

– la convention des Nations unies sur la diversité biologique, du 5 juin 1992,

– l'accord sur les aspects commerciaux des droits sur la propriété intellectuelle de l'Organisation mondiale du commerce, du 15 avril 1994,

– la déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture, du 11 novembre 1997,

– la résolution sur les implications éthiques, scientifiques et sociales du clonage sur la santé humaine, de l'Organisation mondiale de la santé, du 16 mai 1998,

– la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine du Conseil de l'Europe, du 4 avril 1997, et le protocole additionnel du 12 janvier 1998 et la résolution sur la biomédecine du Conseil de l'Europe du 20 septembre 1996,

– vu la recommandation 1046(1986) de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe relative à l'utilisation d'embryons humains,

– la Déclaration d'Helsinki relative aux principes éthiques applicables aux recherches médicales sur des sujets humains, adoptée par l'Association médicale mondiale en juin 1964, dans sa version amendée de 1996,

– le Code de Nuremberg et les Procès de criminels de guerre devant les tribunaux militaires de Nuremberg, conformément à la loi n° 10 du Conseil de Contrôle. Nuremberg, octobre 1946–avril 1949,

– vu la Convention n° 108 du Conseil de l'Europe du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel,

– vu l'avis n° 13 du Groupe européen d'éthique des sciences et des nouvelles technologies (GEE) relatif aux aspects éthiques de l'utilisation des données paramédicales personnelles dans la société de l'information et l'avis n° 15 relatif aux aspects éthiques de la recherche sur les cellules souches humaines et leur utilisation,

– vu le projet de loi adopté par la Chambre des représentants américaine sur l'interdiction de fabrication d'embryons humains par transfert de noyau, que le Sénat des États-Unis examine actuellement,

– vu les auditions effectuées par la commission temporaire sur la génétique humaine, de janvier à mai 2001, en présence d'experts,

– vu les rencontres avec les représentants des parlements nationaux des États membres de l'Union et des pays candidats, ainsi que de la société civile, qui ont eu lieu, respectivement, les 18 et 19 juin ainsi que les 9 et 10 juillet 2001,

– vu l'article 150, paragraphe 2, de son règlement,

– vu le rapport de la commission temporaire sur la génétique humaine et les autres technologies nouvelles de la médecine moderne (A5-0391/2001),

Sur la recherche génomique

A. considérant la nécessité de la recherche, qui permet le progrès réel et continu de la médecine et l'amélioration de la qualité de la vie des personnes et de la société civile,

 

B. considérant que le respect de la dignité humaine impose de ne pas réduire l'homme à des aspects biologiques, de l'évaluer exclusivement selon des critères biologiques ou de le soumettre à des réflexions utilitaires,

 

C. considérant que les principes éthiques fondamentaux doivent être appliqués et étendus aux questions de la bioéthique et que diverses interprétations peuvent apparaître lors de cette extension,

 

D. considérant que l'existence de points de vue différents sur les questions bioéthiques doit servir de base à un dialogue rationnel et argumenté entre les défenseurs de ces positions,

 

E. considérant que l'interprétation des normes et principes éthiques fondamentaux doit aborder en permanence les questions nouvelles découlant du développement des sciences de la vie,

 

F. considérant que dans sa résolution adoptée le 7 septembre 2000, le Parlement européen a estimé que " toute commission temporaire instituée par ce Parlement en vue d'examiner les questions éthiques et juridiques soulevées par de nouveaux développements de la génétique humaine doit prendre comme point de départ les idées déjà exprimées dans les résolutions de cette Assemblée ; la commission devrait dès lors examiner les questions sur lesquelles le Parlement n'a pas encore exprimé clairement sa position ",

 

G. considérant qu'en élaborant la Charte européenne des droits fondamentaux, l'UE a accompli, sur la base de la Convention pour la protection des " Droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine ", un nouveau pas vers le développement d'orientations éthiques au niveau européen, en ce sens que l'article 3 de la Charte affirme que " toute personne a droit à son intégrité physique et mentale " et que " dans le cadre de la médecine et de la biologie, doivent notamment être respectés : le consentement libre et éclairé de la personne concernée, selon les modalités définies par la loi, l'interdiction des pratiques eugéniques, notamment celles qui ont pour but la sélection des personnes, l'interdiction de faire du corps humain et de ses parties, en tant que tels, une source de profit, l'interdiction du clonage reproductif des êtres humains ", en ce que ces principes constituent les exigences minimales du législateur communautaire et non une énumération exhaustive de toutes les régulations nécessaires,

 

Sur les compétences de l'Union en matière de génétique humaine

H. considérant que la connaissance du génome humain marque un progrès déterminant dans la compréhension du mode de fonctionnement du patrimoine génétique humain et de son interaction avec l'environnement ; qu'à la longue, cette compréhension pourrait permettre de diagnostiquer, et éventuellement de prévenir et de soigner de nombreuses maladies de façon beaucoup plus précise, personnalisée et efficace mais que les bénéfices pour l'homme, en termes de santé, ainsi que les importants avantages économiques pour l'Union ne pourront être exploités que si des conditions-cadres appropriées sont établies pour la recherche dans ce secteur en Europe dans le respect de la dignité humaine, ainsi que de l'égalité et de la valeur de la vie humaine ; ces avantages ne peuvent être exploités au maximum que si l'on autorise un débat ouvert et informatif et que l'on donne davantage aux citoyens l'occasion de comprendre les possibilités et les risques de ces nouvelles méthodes,

 

I. considérant que dans ce contexte, la nécessité d'approches coordonnées et intégrées est souhaitable ; que " l'intégration " dans ce domaine ne doit pas seulement être conçue comme un renforcement de la coopération entre la recherche universitaire, le secteur privé allant des petites entreprises de biotechnologie jusqu'aux grandes entreprises pharmaceutiques et le secteur médical pour la réalisation de stades de recherche et de développement intégrés où la liberté de recherche doit être garantie et l'utilité publique de la recherche médicale doit rester l'objectif essentiel, lequel ne peut en tant que tel être subordonné à des considérations commerciales , mais qu'elle doit également englober une participation opportune et active des organismes de réglementation, afin de mettre en place des cadres et des politiques normatives adéquates et de susciter un dialogue avec les utilisateurs finaux et les acteurs sociaux,

 

J. considérant que des efforts substantiels doivent être fournis pour élargir les connaissances du grand public sur les questions de génétique compte tenu de l'importance des progrès et des découvertes réalisés ces dernières années ; un dialogue ouvert entre les citoyens, leurs organisations, les législateurs, les chercheurs et l'industrie, permettra de créer un meilleur climat de confiance ; l'indépendance et l'impartialité des informations sont décisives pour la confiance des citoyens,

 

K. considérant qu'il existe souvent des différences substantielles entre les femmes et les hommes quant aux causes et à l'évolution des maladies et des affections ; que, de ce fait, le principe d'égalité des sexes consacré dans l'Union européenne doit accepter la différenciation à tous les niveaux des mesures de prévention et de thérapie et des activités de recherche dans le domaine des sciences biologiques modernes ; et surtout que les intérêts sanitaires spécifiques des femmes doivent être pris en considération dans le cadre de la médecine reproductive et de ses technologies de suivi ;

 

Sur les principes éthiques communs

 

L. considérant que la dignité humaine est le fondement de tous les instruments juridiques européens et internationaux en matière de droits fondamentaux, le fondement de toutes les constitutions européennes, et l'objectif de tous les États membres ; considérant que la liberté de recherche est aussi reconnue comme un principe éthique important essentiellement subordonné au principe du respect de la dignité humaine ; considérant que la recherche biomédicale doit toujours être en harmonie avec la liberté de conscience et ne doit pas être soumise à des contraintes politiques ou financières illicites ;

 

M. considérant que, même si la recherche scientifique, telle qu'elle est garantie par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être libre de toute contrainte, ce droit fondamental ne justifie en aucun cas aucun acte violant la dignité humaine qui, selon la Charte, est inviolable et doit être respectée et protégée,

 

N. considérant que dans l'histoire de l'Union européenne est inscrit, à côté des valeurs communes et des principes moraux, un pluralisme culturel, éthique et religieux, qui

 

- reflète la richesse de ses traditions ;

- exige le respect mutuel et la tolérance ;

- est pleinement compatible avec le renforcement des dimensions et des positions éthiques communes,

- est conforme à l'article 22 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et à l'article 6 du TUE,

 

O. considérant qu'il existe en Europe un consensus sur les normes et principes éthiques de base réaffirmés dans la Charte des droits fondamentaux, et que des organisations telles que l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le Conseil de l'Europe et l'Union européenne reposent sur des principes éthiques fondamentaux, parmi lesquels en particulier l'inviolabilité de la dignité humaine, l'autonomie individuelle (qui implique l'existence d'un consensus libre et éclairé, le respect de la vie privée et la confidentialité des données personnelles), la nécessité de la recherche, la protection de la santé publique le libre accès de tous les citoyens aux prestations sanitaires nécessaires, le respect des personnes handicapées et leur droit à l'autonomie et à l'intégration sociale et la non discrimination sur la base de caractéristiques génétiques, raciales et religieuses,

 

P. considérant l'existence d'un consensus international concernant les deux conditions dans lesquelles peuvent s'effectuer la recherche et le traitement génétique humain :

 

- les thérapies géniques sur les ovules et sur les spermatozoïdes (la ligne germinale) ne doivent pas être autorisées car des effets pourraient se transmettre aux générations futures ; le traitement appliqué exclusivement aux cellules somatiques qui agissent uniquement sur le sujet sera admis ;

 

- les thérapies ne doivent être autorisées que pour traiter les maladies, y compris les maladies héréditaires et non pour influencer des propriétés qui ne représentent pas un problème de santé ,

 

Q. considérant qu'il n'existe aucune différence entre le clonage à des fins thérapeutiques et le clonage à des fins de reproduction, et considérant que tout assouplissement de la présente interdiction serait de nature à accroître la pression en faveur de nouveaux développements en matière de production et d'utilisation d'embryons,

 

R. considérant que l'Union européenne a le devoir d'encourager la recherche en biotechnologies et en génétique humaine ; que la recherche fondamentale ne peut pas être laissée au seul secteur marchand, et que l'intérêt public exige un soutien fort à toutes formes de recherche susceptibles d'approfondir la connaissance du vivant et d'apporter, à terme, des thérapies nouvelles ; que les interdits nationaux frappant certaines recherches ne peuvent pas empêcher l'ensemble de l'Union européenne de soutenir ces recherches dans les pays où elles sont licites ; que seules les recherches aboutissant au clonage d'êtres humains et à la modification de la lignée germinale devraient être prohibés ; que des thérapies ne devraient être élaborées que pour traiter des maladies graves et non pour améliorer des attributs humains nouveaux,

 

Sur les compétences de l'Union en matière de génétique humaine

 

S. considérant que le traité sur l'Union européenne ne contient pas de dispositions faisant spécifiquement référence à la génétique humaine, mais que l'Union européenne, dans le respect du principe de subsidiarité (article 5 TCE), possède des compétences en la matière puisqu'elle peut adopter des mesures connexes dans ce domaine dans le cadre de la santé publique (article 152 TCE), du financement de la recherche (articles 163 à 173 TCE), du fonctionnement du marché intérieur (article 95 TCE), de la liberté d'établissement (article 47, § 2 TCE), de la libre prestation de services (article 47, § 2, en référence à l'article 55 TCE) et des droits des travailleurs (article 137, § 1 et 2 TCE),

 

T. considérant qu'il est nécessaire que les États membres et l'Union s'emploient conjointement à développer un secteur de la génétique humaine, lequel doit être mis au service de la santé et de la guérison des populations dans le respect de la dignité humaine et à déterminer les domaines dans lesquels une action européenne serait opportune,

 

Sur les travaux de la commission temporaire

U. considérant que la commission temporaire sur la génétique humaine avait pour mission de s'exprimer sur les aspects éthiques, juridiques et sociaux des développements de la médecine moderne, fournissant ainsi au Parlement des analyses détaillées qui lui permettent de prendre d'authentiques décisions politiques et de donner des orientations précises, dans le respect de l'intérêt public et que, dans le respect du mandat attribué à la commission temporaire sur la génétique humaine, les travaux de cette dernière sont essentiellement axés sur les aspects suivants :

 

- l'utilisation des tests génétiques à des fins prédictives et diagnostiques,

 

- le développement et l'application de nouvelles thérapies géniques,

 

- le traitement de l'information génétique,

 

- l'allocation de ressources financières pour le financement de la recherche dans le cadre du sixième programme-cadre,

 

- la brevetabilité des produits et des procédés découlant des êtres vivants,

 

- la définition d'orientations éthiques posées par les nouveaux développements de la biotechnologie et ses applications en Europe,

 

Sur les tests et les analyses génétiques

V. considérant qu'en Europe, l'on constate, d'une part, une augmentation du nombre de laboratoires effectuant des services d'analyse génétique et des expérimentations et, d'autre part, que de telles pratiques se multiplient et sont appelées à se généraliser, et qu'il convient d'en analyser les conséquences sur le développement physique et l'évolution sociale des populations ; considérant que ces pratiques prédictives ne sauraient se substituer aux politiques de prévention existant en matière de santé,

W. soulignant les avantages potentiels de l'information génétique et entendant dès lors tout mettre en œuvre pour que la sélection sur les marchés du travail et des assurances n'empêche les employeurs ou les clients de faire réaliser des tests génétiques,

X. considérant que le recours aux analyses génétiques posent des questions éthiques spécifiques dans le cas des tests prénataux et des diagnostics génétiques préimplantatoires,

Y. considérant qu'en raison de la vitesse à laquelle augmentent les connaissances dans le domaine de la génétique humaine, les conséquences juridiques, sociales, morales et économiques se multiplient et qu'il serait donc utile que le Parlement européen continue à se pencher sur la question en recourant à tous les moyens qu'il jugera bons,

Z. considérant qu'il n'existe pas actuellement de normes européennes ni de règlements communs européens qui garantissent un niveau minimum pour les services d'analyse et de tests génétiques et que ceux ci ne relèvent pas du champ d'application du règlement du Conseil 2309/93/CE établissant des procédures communautaires pour l'autorisation et la surveillance des médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, ni de la directive 98/79/CE relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, qui concerne exclusivement les produits destinés à la commercialisation, et qu'il faut par conséquent prévoir d'autres dispositions ou réviser les directives concernant le domaine des tests génétiques et des médicaments biotechnologiques afin qu'elles soient conformes aux dispositions des directives en question,

AA. considérant que le recours abusif aux tests génétiques, notamment les diagnostics préimplanatoires et prénataux, fait peser des risques de pratiques eugéniques, et que pour ce motif la pratique du DPI est illégale que dans plusieurs pays européens,

AB considérant qu'en dépit des nombreuses initiatives en faveur d'une évaluation de la qualité, promues par des spécialistes de génétique et des organisations professionnelles, les services d'analyse génétique et d'expérimentation sont fournis à des conditions et dans le cadre de dispositifs réglementaires très différents d'un État membre à l'autre,

AC. considérant que les tests génétiques ne peuvent être proposés que s'ils sont accompagnés de conseils compétents et détaillés qui doivent englober les aspects médicaux, éthiques, sociaux, psychologiques et juridiques,

Sur les médicaments biotechnologiques

AD. considérant que l'existence de normes différentes ou qui, en tout état de cause, ne sont pas harmonisées au niveau national à chacun des stades allant du développement à l'expérimentation clinique, entraîne un débat éthique et est considérée comme entravant considérablement le développement et l'expérimentation de nouveaux médicaments biotechnologiques au niveau de l'UE ,

AE. considérant que les premiers pas vers une harmonisation des obligations réglementaires ont été accomplis dans le secteur de la thérapie génique et cellulaire, par le biais de la formulation d'orientations en matière de bonnes pratiques, par l'Agence européenne d'évaluation des médicaments, alors que de nouveaux secteurs tels que l'ingénierie des tissus, les organes artificiels, les analyses génétiques et les expérimentations attendent encore un cadre réglementaire aux niveaux communautaire et national,

Sur les cellules souches

AF. considérant que l'utilisation de cellules souches à des fins thérapeutiques peut éventuellement s'affirmer comme une nouvelle méthode potentiellement révolutionnaire de traiter des maladies et des lésions, cette thérapie visant à développer des cellules ou des tissus différenciés qui pourront être transplantés sur les patients atteints notamment de diabète, de maladie d'Alzheimer, de maladie de Parkinson, d'infarctus, d'ictus, de lésions de la moelle épinière ou de dommages cartilagineux, maladies pour lesquelles il n'existe pas aujourd'hui de thérapie ou de traitement efficace, et que les mesures nécessaires doivent être prises pour éviter les dangers et risques des éventuelles thérapies sur les cellules souches,

AG. considérant que l'utilisation de cellules germinales peut éventuellement s'affirmer comme une nouvelle méthode d'évaluation in vitro de l'action de certains médicaments,

AH. considérant qu'il faut procéder, au sujet de l'origine des cellules souches, à la distinction entre les cellules souches embryonnaires et " adultes " ; que la recherche sur les cellules souches adultes représente une alternative fructueuse et moralement inattaquable à l'utilisation de cellules souches provenant d'embryons humains et que la priorité absolue doit donc être accordée à la recherche sur les cellules souches adultes,

AI. considérant qu'il faut promouvoir le développement de méthodes permettant de réduire les conséquences physiques et psychiques de la fécondation in vitro (FIV) et de freiner, voire empêcher, l'apparition des embryons dits " surnuméraires ",

AJ. considérant que les conditions de production et d'obtention des cellules souches mettent particulièrement en jeu l'intégrité du corps de la femme lors du recours au clonage thérapeutique et aux embryons surnuméraires,

AK. considérant la décision du président des États-Unis d'Amérique, George W. Bush, d'autoriser l'utilisation de fonds fédéraux pour financer la recherche sur les cellules souches adultes, ainsi que sur toute une série de lignes cellulaires obtenues à partir d'embryons surnuméraires déjà utilisés en laboratoire,

Sur le sixième programme-cadre de recherche

AL. considérant que la génomique et les biotechnologies pour la santé et le bien-être général représentent un thème prioritaire de recherche de la proposition de décision du sixième programme-cadre et que les travaux de la commission temporaire y sont également cités en tant que priorités,

Sur l'utilisation des données génétiques

AM. considérant que l'utilisation des diagnostics génétiques ne doit être autorisée que pour raisons strictement médicales,

AN. considérant que le nombre et la variété des tests génétiques ont considérablement augmenté ; que dans certains cas, ces tests peuvent révéler des informations importantes non seulement sur l'individu examiné, mais également sur les membres de sa famille et peuvent en définitive avoir un grand impact sur la vie et sur le style de vie d'un individu, y compris au niveau des choix de reproduction,

AO. considérant que la possibilité pour des entités externes d'obtenir des informations génétiques personnelles implique le risque de nouvelles formes de discrimination qui soulèvent des problèmes liés au respect de la vie privée, à la confidentialité des données et au consentement éclairé de l'intéressé ; considérant, en particulier, que ce risque doit être affronté à la lumière des dispositions existantes en matière de protection des données personnelles, telles que la légitimité du traitement, la limitation des finalités, les mesures de sécurité et les droits individuels réaffirmés par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (article 8),

AP. considérant que l'opportunité d'un rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres dans cette matière peut être facilement déduit de la nature multinationale des entreprises concernées par le traitement des données génétiques, des exigences de circulation transnationale de ces données et de la nécessité d'éviter des divergences législatives dont les effets seront incompatibles avec le bon fonctionnement du marché intérieur,

Sur la brevetabilité des procédures et des produits dérivés du matériel biologique

AQ. considérant que la carte du génome humain, mise au point l'an dernier par la société américaine " Celera Genomics " et par le groupe " Projet génome humain ", a donné lieu, au sein de l'Union européenne, à un débat animé sur la brevetabilité des gènes humains ; que le séquençage du génome a en effet déclenché une course sans précédent vers la constitution d'un " annuaire génétique " ; que la capacité d'isoler, d'identifier et de recombiner entre eux les gènes permet en effet pour la première fois de disposer d'un fonds commun de gènes en tant que ressource de matières premières, dont l'exploitation économique serait précisément encouragée par l'octroi éventuel de brevets,

AR. considérant que la directive 98/44/CE donne des indications sur ce qui est actuellement jugé contraire à la moralité publique et définit aux articles 5 et 6 des inventions non brevetables et qu'un débat se poursuit sur ce qui doit être considéré comme brevetable ou non, mais que, en tout état de cause, le respect dû à la matière vivante, et plus encore à la matière humaine, ne saurait tolérer des modes d'appropriation tels que le brevet, et que la matière vivante doit dès lors être considérée comme non brevetable ; et que les difficultés d'interprétation de cette directive en raison de l'ambivalence de celle-ci et le refus de certains États membres de la transposer dans leur législation créent une insécurité juridique sur la question des inventions biotechnologiques,

 

AS. considérant qu'à la différence des autres secteurs, les innovations biotechnologiques et biomédicales traitent d'organismes vivants et qu'il apparaît donc plus complexe d'opérer une distinction fondamentale entre invention et découverte afin de distinguer les cas où s'applique la réglementation sur les brevets de ceux où cette réglementation n'est pas applicable ;

AT. considérant qu'en dépit des interprétations controversées de la directive susmentionnée, ne sont pas brevetables :

– " le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte d'un de ses éléments, y compris la séquence ou la séquence partielle d'un gène " (article 5) ;

– " les variétés végétales et les races animales ainsi que les procédés essentiellement biologiques pour l'obtention de végétaux et d'animaux " (article 4) ;

– les " inventions dont l'exploitation commerciale serait contraire à l'ordre public ou aux bonnes mœurs " (article 6), dans le respect de l'article 53 de la Convention sur le brevet européen (CBE), reprise par les dispositions correspondantes des lois nationales des États membres adhérant à cette convention ; " les procédés de clonage et de modification de l'identité génétique germinale de l'être humain ; les utilisations d'embryons humains à des fins industrielles et commerciales ainsi que les procédés de modification de l'identité génétique des animaux, sans utilité médicale fondamentale pour l'homme ou l'animal ",

Le Parlement européen :

En ce qui concerne les conditions préalables à un débat public

1. estime qu'il est nécessaire de fournir un effort appréciable pour élargir les connaissances du grand public sur les questions de génétique, compte tenu de l'ampleur des progrès et des découvertes réalisées ces dernières années. Les États membres doivent encourager l'accès des citoyens à des informations indépendantes et impartiales ;

2. afin d'éviter que le débat de société sur la génétique humaine et ses applications ne soit occasionnel et soit en retard sur l'évolution scientifique en cours et afin de permettre le développement d'orientations éthiques au niveau européen, estime qu'il est nécessaire :

 

a) de rappeler des principes éthiques fondamentaux, qui, tout en respectant la diversité des conceptions et des traditions culturelles des États membres, pourront servir de base à une évaluation générale du développement et de l'emploi de la génétique humaine ainsi qu'aux règles juridiques rendues nécessaires dans ce domaine ; de rappeler que ces principes éthiques fondamentaux sont ceux contenus dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et dans les accords internationaux y relatifs, tels que la déclaration d'Helsinki adoptée à Édimbourg en octobre 2000, la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine du Conseil de l'Europe, signée à Oviedo le 4 avril 1997 ainsi que le protocole additionnel sur l'interdiction du clonage des êtres humains signé à Paris le 12 janvier 1998 et la déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme de l'UNESCO ;

 

b) de promouvoir un dialogue entre chercheurs, industriels, sujets normatifs, experts en éthique et acteurs sociaux concernant les nouvelles technologies de pointe dès les premiers stades de leur développement afin de parvenir à des choix responsables assortis des politiques opportunes ;

 

c) d'instaurer un débat public sur le développement et l'utilisation des connaissances et techniques de génétique moléculaire avant que celle-ci ne soit appliquée à grande échelle ;

 

En ce qui concerne le cadre juridique

3. souligne la nécessité de mettre en place un cadre juridiquement contraignant relatif à la génétique humaine et aux questions biotechnologiques, cadre fondé en priorité sur le respect de la personne, l'égalité, la dignité humaine et la valeur de la vie humaine ; toute recherche portant atteinte à la dignité humaine doit être interdite ;

4. rappelle la liberté de la science et de la recherche dans les limites du cadre ainsi défini ;

5. estime que " diriger " notamment, par des moyens financiers, la mutation en cours dans le domaine de la biotechnologie et de la médecine est une tâche essentielle du législateur, national et/ou européen ; recommande donc que toute recherche en la matière soit encadrée par les pouvoirs publics et fasse l'objet du débat public cité au paragraphe 2 ;

6. estime qu'il appartient à l'UE d'établir des normes minimum contraignantes afin d'assurer comme il se doit la protection de l'être humain, conformément aux principes établis dans la Charte des droits fondamentaux et à l'article 5 du traité ;

7. réaffirme que les résultats de la recherche dans le domaine biomédical ont pour but de profiter à l'humanité tout entière et aux générations futures ;

8. rappelle que le principe de subsidiarité s'applique à la génétique humaine et souligne que l'Union peut et doit intervenir en vertu des compétences que lui assigne le traité dans le domaine de la santé (article 152 TCE), en ce qui concerne le fonctionnement du marché intérieur (article 95 TCE), le financement de la recherche (articles 163 à 173 TCE), la liberté d'établissement (article 47, § 2 TCE), la libre prestation de services (article 47, § 2, en référence à l'article 55 TCE) et les droits des travailleurs (article 137, § 1 et 2 TCE) ;

9. estime que le traitement des données génétiques comporte des risques spécifiques pour la protection des données personnelles, et que des mesures non coordonnées éventuelles des États membres en la matière risquent de produire des effets restrictifs incompatibles avec le bon fonctionnement du marché intérieur et sont potentiellement nuisibles aux principes de libre circulation sanctionnés par le traité instituant la CE ;

10. reconnaît que la thérapie génique sera provisoirement onéreuse et demande donc aux États membres de prendre, le cas échéant, des mesures garantissant à tous les groupes de la population un accès identique aux nouvelles thérapies ;

Pour un rôle de l'Union européenne en matière de génétique humaine

I. Génétique humaine : diagnostic et thérapie

Les tests génétiques

11. rappelle que les expériences, les analyses et les diagnostics génétiques sont des actes médicaux qui doivent toujours respecter les règles de " bonnes pratiques cliniques " et qu'il est fondamental que les analyses génétiques répondent à des normes élevées, étant donné que, sur la base des résultats, sont prises des décisions capitales pour la vie d'un individu ; les analyses génétiques doivent garantir l'autonomie de décision des individus tout comme la capacité d'opérer des choix en toute connaissance de cause des traitements et autres éléments qui peuvent déterminer la qualité de la vie ; mais comprendre les avantages de l'analyse génétique peut dépendre également des modalités de fourniture des analyses (fiables et accessibles à parité pour les services), du contexte (services de conseils compétents respectant l'autonomie de l'individu) ainsi que de la technologie ;

12. juge certaines normes indispensables pour l'utilisation clinique de puces ADN :

- les puces doivent répondre à des critères de fiabilité et de validité comparables à ceux auxquels sont soumis les tests normaux d'ADN ;

- les puces ADN ne peuvent servir que pour la recherche sur les gènes - et leurs mutations - correspondant à une maladie spécifique et pour le traitement de celle-ci ;

- l'utilisation de puces ADN doit donc respecter les mêmes règles en matière d'indication que les tests génétiques classiques ;

- les tests multiples servant à détecter les prédispositions génétiques à développer certaines maladies ne sont donc acceptables que dans le respect des mêmes exigences que les tests simples en matière de fiabilité, de conseil et d'information ;

 

13. juge essentiel, pour garantir un développement sûr, positif et responsable des résultats de la nouvelle recherche dans le domaine biomédical, de créer un cadre réglementaire harmonisé, valable sur tout le territoire européen et doté de normes claires qui aient pour objet, non seulement le développement, mais également la formation de pratiques scientifiques et technologiques, assorties d'orientations sur les bonnes pratiques de laboratoire, cliniques et industrielles adaptées à l'évolution biomédicale ; invite la Commission à revoir les pratiques actuelles des États membres qui prévoient l'hétérogénéité des tests génétiques ;

14. estime par ailleurs que les réglementations nationales et européennes en la matière devraient préciser que le recours aux analyses génétiques ne devrait s'effectuer qu'à des fins d'exploration, préventives et thérapeutiques ou de recherche médicale, et sous réserve d'un conseil médical approprié, conformément à l'article 12 de la Convention sur les droits de l'homme et de la biomédecine du Conseil de l'Europe, dans le respect total des droits fondamentaux des individus et, en particulier, de ceux relatifs à la confidentialité et à la protection des données personnelles, déjà sanctionnés sur le plan législatif aux niveaux national et communautaire ;

15. souligne que la possibilité d'une analyse génétique prénatale ne doit pas être utilisée pour déterminer les caractéristiques de l'enfant, telles que la couleur des cheveux ou des yeux, le sexe, etc., mais doit s'attacher uniquement à la santé ;

16. accorde une importance toute particulière au fait qu'aucune femme ne peut être contrainte d'utiliser un diagnostic prénatal et que sa décision de renoncer à une telle méthode doit être respectée et soutenue ;

17. tient compte du fait que de nombreuses analyses génétiques seront utilisées à des fins prédictives et que toute réflexion sur les graves conséquences aux niveaux médical, éthique, psychologique et juridique que peuvent entraîner des résultats erronés implique la nécessité de définir, sur le plan national et européen, un cadre juridique et réglementaire visant à :

 

a/ assurer la qualité et la sécurité des analyses génétiques en Europe ;

b/ garantir au niveau national une parité d'accès aux informations sur la disponibilité, la valeur et les limites des analyses génétiques ;

c/ garantir le respect des valeurs essentielles de la génétique humaine, fondées sur l'autonomie de l'individu (consentement libre et éclairé, liberté à l'égard des pressions exercées par des personnes ou par la société, promotion de la capacité à prendre des décisions autonomes, priorité des droits et des intérêts individuels sur les biens collectifs, respect de la vie privée, droit du patient et de ses proches parents d'être ou non informés) ;

d/ encourager les États membres à garantir la disponibilité d'un conseil génétique compétent et indépendant, en tant que condition de la légitimité des tests génétiques prédictifs ;

e/ promouvoir de larges initiatives de formation destinées tant aux professionnels qu'au public afin d'informer des risques et des avantages, mais également des limites des analyses génétiques, par le biais des organisations publiques et privées, gouvernementales ou non gouvernementales, et en particulier par le biais des comités nationaux d'éthique qui doivent se rapprocher des citoyens et créer des canaux de communication en recourant aux technologies actuelles de l'information ;

f/ garantir que les personnes porteuses de différences génétiques soient respectées et soutenues par la société, notamment par le biais de lois assurant une protection juste et appropriée et encourageant leur intégration, en excluant toute forme de discrimination négative à l'égard des intéressés et que ces différences puissent être reconnues comme constitutives de l'identité propre de la personne et donc respectables en tant que telles ;

g/ encourager les États membres à renforcer les solidarités familiales et sociales, notamment en créant des services sociaux qui permettent de supporter les conséquences médicales, sociales et économiques liées aux handicaps, y compris à l'âge adulte (soutien aux parents, accès à l'instruction, possibilités d'emploi) et qui élargissent les possibilités de dialogue et d'aide pour les personnes handicapées ou leurs parents ;

- créer des programmes de sensibilisation au handicap tant pour les jeunes que pour les adultes, notamment en organisant des rencontres et des activités communes au sein des écoles avec des personnes handicapées,

- favoriser la mise en place de mesures contribuant à une meilleure intégration et acceptation des personnes handicapées dans la société et qui permettent d'améliorer leur situation personnelle ;

- promouvoir la recherche de causes de maladie possibles, par exemple environnementales ou sociales, et de méthodes permettant de combattre leurs effets ;

- mettre en place, au niveau européen, un réseau de laboratoires compétents pour les pathologies rares et assurer un financement public approprié quand les investissements privés sont absents ou insuffisants ;

- promouvoir l'implication des autorités compétentes dans la protection des données personnelles et du groupe européen qui les réunit en vertu de l'article 29 de la directive 95/46/CE ;

18. demande par conséquent à la Commission d'agir en ce sens en présentant des initiatives visant à combler le vide réglementaire actuel ; à cette fin, elle devrait si possible choisir une base juridique (par exemple l'article 152 – Santé, ou 153 – Protection des consommateurs) qui laisse la voie libre à l'introduction de mesures de protection plus strictes pour les États membres ;

19. demande en outre de fixer des normes minimum d'utilisation du diagnostic génétique prénatal qui prévoient, outre un conseil génétique compétent, un conseil psychosocial indépendant, et qui excluent au moins que les analyses génétiques prénatales puissent être effectuées dans le but de prévoir la couleur des yeux ou des cheveux, la taille et l'intelligence (même avec une certaine probabilité) ; la détermination du sexe dans le cadre d'un diagnostic prénatal devrait, si tant est qu'elle fût possible, n'être autorisée que dans le cas de maladies graves liées au sexe de l'enfant à naître ;

20. souligne que les tests prédictifs qui révèlent uniquement le risque d'apparition ultérieure d'une maladie au cours de la vie ne doivent pas, par principe, être utilisés avant la naissance, car, d'une part, ils ne permettent pas de prédire l'apparition de la maladie et, d'autre part, compte tenu des progrès de la médecine, il existe une possibilité que ces maladies, qui ne peuvent pas être traitées actuellement ou ne peuvent l'être que difficilement, seront traitables au moment où elles affecteront le futur enfant ;

La pharmacogénomique

21. estime que la perspective de parvenir à des soins personnalisés en vue d'élaborer et d'administrer les médicaments " à la carte " en définissant les profils génétiques constitués par ce que l'on appelle en jargon médical des snips (single nucleotide polymorphisms) apparaît dès aujourd'hui prometteuse ;

22. considère tout aussi capital de prendre systématiquement en considération et de poursuivre les recherches sur les facteurs déclenchants de maladies qui peuvent être autres que génétiques (liés à l'hygiène de vie, au régime alimentaire, au tabagisme, etc.) ;

23. reconnaît les grands avantages de la pharmacogénétique (étude des différences de réactions individuelles aux médicaments) et de la pharmacogénomique (mise au point de traitements thérapeutiques personnalisés, dénommés " personal pills "), au premier titre en termes de réponse thérapeutique et d'économie de souffrances et, en second lieu, en termes économiques, tant au niveau du développement du médicament que lors de son administration, et estime qu'il convient d'éviter de prescrire des médicaments à des patients qui n'en tireront aucun bénéfice ou qui pourraient au contraire être lésés ;

24. considère également que la pathogénétique revêt une grande importance médicale et économique ; le domaine de recherche de la pathogénétique vise à comprendre les rapports d'influence d'apparition et de développement de pathologies sous l'angle de la génétique, et, à partir des connaissances ainsi obtenues, à acquérir des bases pour la prise de mesures thérapeutiques ou préventives, ou pour le développement de médicaments ; la pathogénétique tient compte des nombreux processus d'interaction entre les gènes, les produits géniques et les facteurs environnementaux, et offre des perspectives prometteuses d'influence efficace sur les processus pathologiques sans modification du génome ;

25. rappelle que l'existence pléthorique de normes différentes ou qui, en tout état de cause, ne sont pas harmonisées au niveau national, à tous les stades (du développement à l'expérimentation clinique) entrave notablement le développement et l'expérimentation de nouveaux biomédicaments au niveau de l'UE, qu'il faut au contraire promouvoir ; en conséquence, un premier pas serait que la directive de l'Union européenne sur les essais cliniques soit intégrée au droit national le plus rapidement possible ; exploiter au maximum la possibilité ainsi offerte permettra aux citoyens de l'Union européenne de tirer des avantages sanitaires significatifs de la recherche génétique et attirera de nouveaux investissements dans les secteurs scientifiques et pharmaceutiques européens dans un contexte mondial de plus en plus compétitif ;

26. réclame une meilleure synergie entre secteur public et secteur privé afin d'obtenir des résultats optimaux pour tous dans le domaine de la pharmacogénétique, faute de quoi des règles publiques rigides ou au contraire trop timorées risquent de se traduire par une perte nette de bénéfices ;

27. juge nécessaire d'établir un cadre réglementaire harmonisé qui privilégie les intérêts du public, la santé et la communauté de recherche, et qui soit doté de normes claires et rigoureuses non seulement pour la mise au point, mais également pour l'expérimentation et l'homologation des nouveaux biomédicaments et des réactifs pour tests génétiques ;

28. juge important de souligner que la génétique humaine peut, dans certains domaines, apporter des améliorations sensibles pour les personnes malades et handicapées, que les succès peuvent cependant tarder à venir dans de nombreux domaines et que, pour des raisons biologiques, même dans l'hypothèse d'une utilisation illimitée de la thérapie et de la sélection eugénique (qui serait de toute façon inacceptable d'un point de vue éthique), il serait impossible d'éradiquer totalement de la planète les maladies et les handicaps ; il est donc absolument nécessaire d'affirmer que les personnes handicapées feront également partie de notre vie future et qu'elles doivent, au même titre que les membres de leur famille, être soutenues solidairement par la société ;

II. Utilisation des données personnelles relatives aux caractéristiques génétiques obtenues par l'analyse directe ou indirecte du génome humain

29. stipule qu'il ne pourra être procédé à des tests prédictifs que pour raisons strictement médicales ou de recherche médicale et sous réserve d'un conseil génétique approprié et rappelle que toute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant et que toute forme de discrimination à l'encontre d'une personne en raison de son patrimoine génétique est interdite ; s'exprime par conséquent en faveur de l'adaptation de l'article 13 du traité instituant la Communauté européenne lors de sa prochaine révision ;

30. souligne que la recherche génétique doit être conduite avec des garanties suffisantes assurant la protection des intérêts individuels et ceux des générations futures, tout en permettant de faire avancer les activités de recherche médicale légitimes, dont peut tirer profit la société tout comme les activités visant à élucider, grâce aux analyses d'ADN, les infractions pénales graves ;

31. insiste pour que l'utilisation de l'information génétique personnelle et l'accès à cette dernière par des tiers fassent l'objet d'un débat en vue de l'élaboration d'une législation qui doit essentiellement protéger l'intégrité personnelle de l'individu et être axée sur la nécessité d'en obtenir le consentement, libre et éclairé, afin d'assurer la protection de sa santé ou de la santé de ses descendants (ou de la recherche médicale), en excluant toute autre finalité ; compte tenu néanmoins de ce qu'il doit être possible, par exemple dans la recherche, de connaître l'identité du donneur et du receveur de cellules, sans que les personnes en question aient connaissance de ces informations ;

32. estime qu'il y a lieu de protéger en particulier les travailleurs contre toute demande d'information génétique ; le travailleur, en raison de sa position de faiblesse, doit être protégé par la législation ;

33. rappelle la directive 95/46/CE qui considère la protection des données personnelles dans le cadre plus général des garanties des droits et des libertés fondamentales, et est d'accord avec le groupe européen d'éthique des sciences et des nouvelles technologies (GEE) qui a souligné dans son avis n° 13 relatif aux aspects éthiques de l'utilisation des données personnelles relatives à la santé qu'il n'existe pas encore de législation européenne spécifique en matière de protection des données personnelles relatives à la santé, et souhaite qu'une directive soit élaborée par la Commission afin de relever le défi que représente l'informatisation de ces données ; demande donc à la Commission de passer en revue les nouveautés en matière de stockage de protection des données en tenant compte des progrès techniques accomplis ;

34. estime que cette directive ne doit pas se limiter à l'énoncé pourtant indispensable de principes généraux découlant du cadre global des droits fondamentaux (interdiction absolue de collecter des données, exception faite pour la protection de la santé et de l'activité de recherche ; légitimité du recours aux tests uniquement dans des cas spécifiques et/ou à des fins déterminées ; légitimité des tests uniquement s'il y a consentement de l'intéressé ; interdictions spécifiques d'utilisation de ces données ; règles concernant l'accès aux données recueillies sur une base qui ne soit pas strictement individuelle – en particulier le problème de l'accès à l'intérieur du groupe familial entre consanguins), mais en établissant par ailleurs des mécanismes d'individualisation, la classification et le contrôle des analyses génétiques en vue d'éviter des abus dans l'utilisation de ces dernières et de ne pas faire émerger d'inquiétants paramètres de " normalité génétique " ;

35. juge nécessaire, en ce qui concerne les sujets publics, pour lesquels le consentement de l'intéressé n'est pas requis, que la légitimité du traitement des données soit subordonnée à l'existence d'une " disposition expresse de loi " qui stipule les opérations à exécuter et les finalités d'intérêt public à poursuivre (en excluant toute finalité de caractère économique) et soumette de telles activités, pour ce qui est de la compétence, à la vigilance des autorités garantes de la protection des données personnelles, instituées en vertu de l'article 28 de la directive 95/46/CE ;

36. estime, étant donné le nombre de gènes, semble-t-il, très inférieur à ce que l'on supputait, qu'il convient de revoir fondamentalement la thèse qui consiste à leur accorder un caractère exclusif, voire prédominant dans la production de conséquences déterminées, lesquelles relèvent plutôt de processus complexes d'interaction entre gènes, protéines et environnement ; l'enthousiasme sur la prédictivité étant retombé, la possibilité de recourir aux données génétiques pour les évaluations prospectives des individus ne doit pas être accordée, puisque celles-ci ne prennent précisément pas en compte le rapport décisif avec les protéines et l'environnement et fournissent par conséquent une image déformée ou incomplète de l'individu ; l'individu est par ailleurs parfaitement en droit de faire pratiquer un test génétique ;

37. estime qu'utiliser les données génétiques pour restreindre la possibilité de recourir à l'assurance-vie ou à l'assurance-maladie reviendrait à instaurer une nouvelle hiérarchie sociale qui classerait les individus en fonction de leur carte génétique et qui aurait pour effet de réduire à proprement parler la citoyenneté et de nier le droit à un accès équitable à des soins de santé de qualité ;

38. rappelle, par conséquent, que les compagnies d'assurance n'ont pas le droit de réclamer, avant ou après la conclusion d'un contrat d'assurance, l'exécution d'analyses génétiques, la communication des résultats relatifs à des analyses génétiques déjà effectuées, et déclare que les analyses génétiques ne doivent pas devenir une condition préliminaire à la conclusion d'un contrat d'assurance ; estime que les assureurs peuvent prétendre être informés des données génétiques dont a connaissance l'intéressé lorsque la valeur assurée est extrêmement élevée et lorsqu'il existe un soupçon que le preneur d'assurance agisse sur la base de cette connaissance ;

39. constate que la question de la mise à disposition au profit de compagnies d'assurance d'analyses génétiques ayant été effectuées avant la conclusion d'un contrat n'est pas réglementée par la législation communautaire et que les législations et les pratiques au niveau national diffèrent ; invite par conséquent la Commission européenne, sur la base de l'article 47, paragraphe 2, en rapport avec l'article 55 du traité instituant la Communauté européenne, à proposer des initiatives législatives pertinentes incluant l'interdiction d'utilisation d'informations médicales nominatives, telles que la typologie génétique, à des fins de discrimination en assurance ;

40. souligne que les conséquences des tests génétiques sur les droits fondamentaux, le respect de principes éthiques et l'organisation des rapports sociaux sont tout aussi importantes dans le domaine de l'emploi ; à la différence du secteur des assurances où les argumentations en faveur de l'utilisation des données génétiques ont exclusivement un caractère économique, il faut insister en l'occurrence sur l'intérêt du travailleur lui-même à ne pas être employé dans des activités nocives ; toutefois, les indications qui découlent des données génétiques ne peuvent remplacer les politiques concernant l'environnement sur le lieu de travail ou les conditions plus générales de sécurité dans lesquelles doivent se dérouler des activités à risque ;

41. propose l'interdiction de la discrimination des travailleurs sur la base de critères génétiques ainsi que sur le résultat de dépistages génétiques dans le cadre de visites médicales en série ; le dépistage génétique ne peut servir de critère d'évaluation dans le domaine des assurances ;

42. considère qu'une réglementation fondée uniquement sur le consentement éclairé révèle toute son inadaptation dans ce secteur, étant donné qu'en période de chômage, la propension à accepter n'importe quel emploi est bien connue, le consentement étant moins la manifestation d'une liberté que l'effet d'une gêne matérielle ; un droit de réflexion devrait donc être reconnu aux personnes intéressées, inspiré du modèle de ce qui est prévu concernant l'opposition au traitement des données personnelles ; les politiques institutionnelles, qu'elles soient nationales et/ou communautaires, doivent au contraire tendre à une information adéquate non seulement des intéressés, mais de l'opinion, de façon à renforcer la sensibilisation du public aux questions liées à l'utilisation des informations génétiques et à mettre en place des politiques générales de contrôle social ;

43. note que la tendance à généraliser la collecte de données génétiques souligne le problème que représente la multiplication des politiques de surveillance et de contrôle que suscitent les différentes technologies ; l'on ne saurait admettre des politiques visant à s'approprier les informations génétiques, même si elles sont assorties de garanties formelles de respect des droits des personnes en vertu de l'anonymat des données ; il importe de mettre en place un cadre institutionnel qui subordonne l'accès aux tests à des exigences effectives de protection de la santé, évite tout détournement des règles existantes par l'accès direct aux tests, méconnaissant la nécessité d'informer via le conseil génétique ;

44. recommande aux États membres de protéger le droit des individus à la confidentialité des données génétiques et de faire en sorte que l'analyse génétique soit utilisée à des fins bénéfiques pour les patients en tant qu'individus, pour leurs parents et pour la société dans son ensemble ; il faudrait prévoir des dérogations à ce principe général de confidentialité dès lors que les marqueurs génétiques conservés dans les banques de données du DNA seraient utilisés pour identifier et capturer des criminels ;

III. Brevetabilité des procédures et des produits dérivés du matériel biologique

45. reconnaît que le brevet, instrument traditionnel de la politique industrielle qui promeut le financement privé de la recherche et qui est destiné à garantir l'exclusivité de l'exploitation industrielle de produits d'innovation, pose des problèmes nouveaux dès lors qu'il s'applique au matériel biologique et en particulier au génome humain ;

46. rappelle que la directive 98/44/CE relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques, se trouve actuellement au stade de la transposition dans les systèmes législatifs des États membres, que quatre États membres l'ont déjà transposée dans leur législation, et que cette directive ne fait que codifier la pratique prévalant dans le domaine des biotechnologies ; constate que sa transposition a soulevé des difficultés dans certains États membres tandis qu'elle a été relativement aisée dans d'autres ;

47. reconnaît, malgré les difficultés et les débats concernant l'interprétation de cette directive, notamment en ce qui concerne l'article 5, paragraphes 1 et 2, l'importance d'un cadre juridique et d'une harmonisation dans ce domaine ; considère les difficultés comme émanant en particulier du débat concernant la portée excessive des brevets d'invention, bloquant la recherche dans de nouveaux domaines ;

48. constate que les réglementations à l'heure actuelle en Europe tendent à être hétérogènes malgré l'existence de la directive 98/44/CE mais qu'une éventuelle introduction d'un brevet communautaire peut unifier la situation ;

49. rappelle que selon le droit européen en vigueur, une invention, pour être jugée brevetable, doit impliquer une activité inventive et doit pouvoir donner lieu à une application industrielle et ne peut consister en une simple découverte, aussi complexe soit-elle, de ce qui existe déjà ;

50. note que, conformément à l'article 6, paragraphe 2, sous c), de la directive " les utilisations d'embryons humains à des fins industrielles ou commerciales " doivent être considérées comme non brevetables ; invite instamment la Commission à clarifier, par le biais d'un document d'orientation, d'un amendement de la directive 98/44/CE ou d'une législation supplémentaire que les hybrides, chimères, lignes de cellules souches humaines ou les traitements, ainsi que les médicaments, produits ou procédures dérivés de la recherche ou développés par la recherche sur les embryons créés in vitro dans un but autre que la grossesse, ne doivent pas être brevetables ;

51. rappelle qu'il est fait obligation à la Commission, de publier :

 

a/ tous les cinq ans un rapport sur les éventuels problèmes rencontrés dans l'application de la directive au regard des accords internationaux sur la protection des droits de l'homme auxquels les États membres ont adhéré ;

 

b/ deux ans après l'entrée en vigueur de la directive (30 juillet 1998) un rapport tendant à évaluer les implications dans le domaine de la recherche fondamentale en génie génétique de la non publication ou publication tardive de documents dont l'objet pourrait être brevetable ;

 

c/ et tous les ans, un rapport sur l'évolution et les implications du droit des brevets dans le domaine de la biotechnologie et du génie génétique. La Commission transmet ces rapports au Parlement européen et au Conseil (article 16). Sur la base de ce qui précède, demande à la Commission de ne pas retarder davantage la présentation du premier rapport annuel qui aurait dû être soumis au 30 juillet 2001, d'y consigner les résultats des réunions d'experts, y compris les consultations de la Commission sur la question du brevetage des séquences génétiques, et de rapporter toute communication entre la Commission et les États membres concernant les difficultés d'interprétation soulevées par les États membres ;

 

52. insiste sur la nécessité d'une évaluation approfondie de la directive 98/44 qui prenne en considération, outre les aspects socio-économiques, les conséquences de vastes descriptions de brevet sur le progrès technologique et l'innovation ;

 

53. réclame, dans le cadre des rapports mentionnés ci-dessus, l'analyse, par la Commission, des différences d'emploi des licences d'exploitation obligatoires par les États membres comme obstacle à un développement équilibré ou de la pertinence de l'introduction de nouvelles règles en matière de licences d'exploitation obligatoires au niveau communautaire, et ce dans le cadre autorisé par l'accord TRIPS ;

 

IV. Clonage et recherche sur les cellules souches

 

54. rappelle que le clonage reproductif des êtres humains devrait être interdit indépendamment de la technique utilisée et exhorte la Commission ainsi que les États membres à prendre les mesures nécessaires pour interdire le clonage reproductif au moyen d'un instrument international juridiquement contraignant ;

 

55. demande l'interdiction de toute activité :

 

(a) visant à modifier la ligne germinale humaine ;

(b) visant ou impliquant le clonage reproductif d'êtres humains ;

(c) visant à produire des hybrides ou des chimères ;

(d) utilisant les cellules souches embryonnaires ou les embryons humains, lorsque ceux-ci ont été créés in vitro dans un but autre que la grossesse ;

 

56. estime qu'un financement public considérable devrait être prévu pour le développement et l'utilisation de procédés scientifiques visant à éviter la production d'embryons " excédentaires " ; les États membres devraient également examiner les possibilités de permettre l'adoption d'embryons " excédentaires " par des couples stériles ;

 

57. demande l'interdiction, dans toute la Communauté, du commerce des embryons humains, des cellules souches embryonnaires ainsi que des ovules et spermatozoïdes ;

 

58. fait remarquer que la création d'embryons humains par le transfert du noyau est la condition préalable au clonage dit reproductif et que l'implantation d'embryons dans l'utérus, d'un point de vue technique, est très facile à réaliser ;

 

59. confirme sa position selon laquelle, d'un point de vue éthique, le clonage dit thérapeutique est également problématique parce qu'il implique la mise à disposition d'un grand nombre d'ovules humains, ce qui peut entraîner une exploitation du corps humain en fonction du sexe, associée à des risques importants pour les femmes, et implique la création d'embryons humains uniquement à des fins de recherche ;

 

60. confirme donc sa position selon laquelle le moyen le plus efficace et crédible de s'opposer au clonage des êtres humains est d'exclure aussi bien le clonage dit thérapeutique que le clonage dit reproductif des êtres humains ;

 

61. se félicite par conséquent de la décision de la Chambre des Représentants américaine d'interdire la création d'embryons humains par transfert du noyau, en l'assortissant de peines sévères de privation de liberté, et demande au Sénat d'adopter cette décision aussi vite que possible ;

 

62. réaffirme sa demande d'interdiction du clonage humain, si possible au niveau mondial ;

 

63. demande aux États membres qui ne l'ont pas encore fait de promulguer des lois contre la création par clonage d'embryons humains génétiquement identiques ;

 

64. demande à la Commission, dans l'éventualité où ceci ne se produirait pas dans un certain laps de temps, de vérifier qu'une proposition communautaire poursuivant cet objectif, par exemple sur la base de l'article 152, paragraphe 4, alinéa a), du traité UE est possible ;

 

65. demande que la création d'embryons humains ne soit autorisée que pour provoquer une grossesse ;

 

66. reconnaît qu'il existe un dilemme éthique résultant de la présence, dans de nombreux pays de la Communauté, de milliers d'embryons humains fabriqués aux fins de la FIV, dont l'implantation n'est cependant plus possible pour les parents génétiques ;

 

67. reconnaît qu'aussi bien la destruction de ces embryons que leur mise à disposition pour la recherche fait l'objet d'une controverse éthique ;

 

68. demande par conséquent que soit étudiée l'alternative qui consisterait à les mettre à disposition de couples sans enfant, pour lesquels une FIV traditionnelle est impossible pour des raisons médicales ou autres, alternative qui nécessiterait la promulgation de réglementations strictes afin de prévenir tout commerce d'embryons ; demande en outre que soient développées des techniques de traitement de la stérilité excluant la formation d'embryons excédentaires et réduisant au minimum les inconvénients pour la santé de la femme ;

 

69. exprime son soutien illimité au travail sur les cellules souches adultes et constate avec intérêt que, dans certains domaines de recherche (par exemple la leucémie, le traitement de certaines atteintes osseuses ou cartilagineuses et, vraisemblablement, le traitement de l'infarctus du myocarde), ce travail a déjà permis d'obtenir des résultats concrets de guérison chez certains patients, tandis que la recherche sur les cellules souches embryonnaires n'a jusqu'ici permis d'obtenir un début de guérison que dans le cadre d'études sur les animaux ;

 

70. demande aux États membres, à la Commission et à tous les chercheurs concernés de soutenir énergiquement et d'étudier des alternatives possibles à la recherche sur les cellules souches embryonnaires, en insistant sur le fait que ces alternatives englobent non seulement l'étude des cellules souches adultes, mais aussi d'autres approches scientifiques ;

 

71. souligne que dans sa résolution du 12 mars 1997 , le Parlement européen a affirmé que " le clonage des êtres humains ne saurait en aucune circonstance être justifié ou toléré par une société humaine quelle qu'elle soit, car il équivaut à une violation grave des droits fondamentaux de l'homme, et il est contraire au principe d'égalité des êtres humains puisqu'il permet une sélection eugéniste et raciste de l'espèce humaine, il offense la dignité de l'être humain et il exige une expérimentation sur l'homme " ;

 

72. recommande aux organisations internationales et régionales comme les Nations unies et le Conseil de l'Europe de définir un droit de l'homme à être génétiquement unique, ou portant spécifiquement sur la protection de son patrimoine génétique ;

 

V. Sixième programme cadre de recherche

Lignes directrices concernant l'élaboration d'un cadre éthique

73. juge essentiel de définir des lignes directrices en vue de l'élaboration d'un cadre éthique, en se fondant sur les dispositions déjà établies dans le cinquième programme cadre (1998 2002) et en particulier dans le programme spécifique " Qualité de la vie " ;

 

74. prend acte, à cette fin, des décisions du Président des Etats-Unis d'Amérique, George W. Bush, d'autoriser l'utilisation de fonds fédéraux pour la recherche sur les cellules souches adultes ainsi que sur une série de lignées cellulaires obtenues à partir d'embryons excédentaires déjà utilisés en laboratoire,

 

75. estime à cette fin que toutes les activités de recherche liées au sixième programme cadre doivent être effectuées dans le respect des principes éthiques fondamentaux, notamment :

 

a/ les principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les conventions internationales pertinentes citées au paragraphe 2 a) bis de cette résolution ;

b/ les législations des États membres ;

76. constate que l'une des intentions du nouveau programme de recherche est d'utiliser pour la première fois la procédure de l'article 169 du Traité CE en vertu duquel les Communautés peuvent participer à des projets en coopération, auxquels seuls certains des États membres participent ; les Communautés devraient participer à ces projets dans ces cas en particulier, afin de garantir le bénéfice des recherches à tous les habitants des Communautés ;

 

77. souscrit à cet égard à l'avis du Groupe européen d'éthique, relatif aux aspects éthiques de la recherche sur les cellules souches, qui recommande ce qui suit :

 

a/ l'acceptabilité éthique de la recherche sur les cellules souches dépend non seulement des objectifs mais également de l'origine des cellules souches ;

b/ qu'en raison de l'absence actuelle de consensus éthique sur la création d'embryons humains par le transfert de noyaux de cellules somatiques (clonage thérapeutique) pour les exigences de la recherche sur la thérapie cellulaire, un vaste champ de recherche soit exploré à l'aide d'autres extraits de cellules souches humaines ;

c/ établir un budget communautaire spécifique pour financer la recherche sur la base de ces orientations, notamment sur les cellules souches adultes ;

d/ veiller, au niveau européen, à ce que les résultats de la recherche fassent l'objet d'une large diffusion et ne soient pas tenus secrets pour des motifs commerciaux ;

e/ garantir l'évaluation éthique des cellules souches, financée par le budget communautaire, avant le lancement des projets et au cours de la mise en œuvre de ces derniers ;

78. estime par conséquent qu'en matière de cellules souches, la priorité du financement communautaire doit être accordée aux projets de recherche qui prévoient le recours à des cellules souches adultes tandis que les projets de recherche utilisant des cellules souches ne devraient pas recevoir ce type de financement ;

79. recommande d'exclure du financement communautaire les actions de recherche ainsi que le développement technologique et les activités de démonstration impliquant :

a/ la création, à des fins autres que reproductives, d'embryons humains à partir du don de gamètes ;

b/ la création d'embryons humains par le transfert de noyaux de cellules somatiques (clonage thérapeutique) et le clonage d'être humains (clonage reproductif) ;

c/ les activités de recherche qui ont pour but de modifier la ligne germinale de l'homme ;

d/ la création artificielle intentionnelle d'embryons d'êtres humains dans un but autre que la grossesse ;

e/ toute autre forme de recherche ayant pour but l'utilisation d'embryons humains ;

80. se prononce en faveur d'une interdiction du clonage humain, et ce quelles que soient l'intention et les techniques ou méthodes utilisées, et demande à la Commission européenne d'étudier les possibilités juridiques d'une interdiction du clonage par l'Union européenne ;

 

81. rappelle que le clonage humain à des fins de reproduction est interdit et invite les États membres à s'associer à l'initiative franco-allemande en faveur d'une convention des Nations unies contre ce clonage ;

82. rappelle que le clonage humain à des fins de reproduction est interdit et que la distinction quant à la finalité reproductive ou thérapeutique du clonage n'est pas significative quant à la technique mise en œuvre ;

Recommandations aux États membres de l'Union concernant le financement de la recherche génomique

83. reconnaît que la question de la réglementation de la recherche sur les embryons au niveau européen est juridiquement controversée et que, même dans le cas où une réglementation européenne serait juridiquement possible, seule l'adoption de certaines règles fondamentales est réaliste, de sorte qu'à court terme, il appartiendra à chaque État membre d'interdire ou d'autoriser la recherche sur les embryons ; souligne par conséquent que, dans le cas précité, le respect de la dignité humaine exige l'établissement de règles visant à empêcher le risque d'expérimentation illicite et d'instrumentalisation de l'embryon humain ;

84. considère que, par respect pour les convictions éthiques d'un grand nombre de citoyens européens et pour l'ordre juridique des États membres, seules doivent être financées par les fonds de l'Union Européenne les activités de recherche qui n'enfreignent en rien les principes éthiques fondamentaux de l'ordre constitutionnel d'aucun des États membres ;

85. souligne que la recherche de traitement de la stérilité ne concourant pas à la création d'embryons " excédentaires " doit être encouragée et financée tant au niveau national qu'européen ;

86. encourage les États membres à simplifier les procédures d'adoption, notamment en proposant systématiquement l'adoption d'embryons actuellement congelés aux couples disposés à recourir à une FIV, ou dont la FIV n'aurait pas abouti ;

87. juge important que la recherche dans le domaine de la biotechnologie ne se concentre pas uniquement sur de grandes multinationales ; estime par conséquent qu'il conviendrait de convier les autorités publiques, aux niveaux national, communautaire et international à :

a/ contrôler les effets d'une telle concentration dans ce secteur et, le cas échéant, intervenir s'ils risquent d'avoir une incidence sur l'intérêt public ;

b/ protéger la position des entreprises de moindre dimension et des organisations sans but lucratif ;

c/ promouvoir une recherche forte, indépendante et financée par des fonds publics, axée principalement sur les domaines qui offrent de faibles capacités de rendement financier à court ou à moyen terme et qui sont négligés par l'industrie privée, tels les traitements pour les maladies frappant en priorité les personnes démunies ou les enfants ou pour les maladies qui apparaissent dans les pays les plus pauvres et les traitements pour les maladies rares ;

d/ promouvoir la recherche sur les risques de la biotechnologie et sur les moyens d'éviter ces risques ;

e/ favoriser la constitution de partenariats publics et privés ;

88. estime que la recherche dans le domaine de la biotechnologie ne peut conduire au renforcement du rôle de multinationales échappant à tout contrôle et insiste dès lors pour que les autorités publiques, tant au niveau des États qu'à celui de l'Union, encadrent soigneusement toute recherche menée en ce domaine, assurent une transparence sans faille et alimentent à cet égard le débat public cité au point 1 ;

89. recommande d'envisager la possibilité d'effectuer des changements en matière de politique publique concernant le financement d'une recherche véritablement indépendante et de base qui assurerait l'existence d'une activité de recherche scientifique publique indépendante et forte ;

Lignes d'action pour le financement communautaire de la recherche génomique

90. demande que l'Union soit dotée d'un cadre juridique et réglementaire et d'un financement important consacré à la recherche dans le domaine du génome, tout comme le prévoit la proposition de décision relative au sixième programme-cadre de recherche ; à cette fin, juge nécessaire :

a/ de soutenir la priorité attribuée à la science génomique et à la biotechnologie pour la santé et le bien-être global, en affirmant, de préférence par l'introduction d'une nouvelle priorité " recherche de santé ", la nécessité de soutenir les procédés visant à améliorer la situation sanitaire qui ne doit pas être directement liée au génie génétique et à la biotechnologie ;

b/ de soutenir la coopération entre les chercheurs universitaires des différentes structures (universités, organismes de recherche, hôpitaux, entrepreneurs, industrie en général) nationales et européennes dans la définition des fonctionnalités des données obtenues par le génome et dans la mise au point de nouveaux traitements médicaux ;

c/ de soutenir la recherche non normative en matière de génétique humaine (normes d'évaluation de la qualité et garanties de la qualité des analyses génétiques) ;

d/ de stimuler la participation opportune et active des acteurs concernés par la création de lignes directrices destinées à examiner l'évolution dans le domaine biomédical ;

e/ de créer des systèmes centralisés d'information et/ou de matériel communs, tels que l'enregistrement de données sur les nouveaux biomédicaments et les tests génétiques, y compris les données cliniques relatives à l'expérimentation et à l'adoption ultérieure (par exemple observations sur les réactions négatives), la comparaison avec des données relatives à la pharmacogénomique (en corrélant la spécificité génétique à la réaction individuelle aux médicaments) ou encore l'organisation de banques de données sur les patients ou la création de banques centrales pour les tissus ;

f/ de soutenir la recherche en matière d'expériences transgéniques afin de répondre aux besoins de la médecine ;

g/ de soutenir la recherche qui fera progresser la compréhension des questions juridiques, éthiques, sociales et économiques qui découlent des nouvelles connaissances dans le domaine de la génétique humaine et qui permettra de faire plus efficacement face à ces défis ;

h/ de prendre en compte les différences liées au sexe lors des activités de recherche, ainsi que les mesures de précaution et thérapeutiques dans le domaine de la recherche génomique et de la biotechnologie ;

i/ de soutenir l'élaboration d'initiatives visant à favoriser un nouveau consensus à l'égard des applications des sciences de la vie afin, d'une part, de vulgariser ces sciences (par exemple par le biais des médias) dans le but de sensibiliser davantage le grand public, et, d'autre part, d'inciter les scientifiques à davantage tenir compte des préoccupations de la population et à les intégrer dans leur travail ;

j/ de soutenir la formation et l'enseignement intégrés et multidisciplinaires. Le renforcement de l'enseignement et de la formation dans les technologies de pointe (par exemple la pharmacogénomique, la bio informatique, les nanobiotechnologies) et la création de programmes intégrés pour l'enseignement et la formation en matière de recherche biomédicale/développement/gestion par le biais d'une coopération internationale entre les universités et l'industrie, offriront la possibilité aux universités, à l'industrie et à la société de suivre au même rythme l'évolution, marquée par l'intégration croissante entre analyse du génotype, diagnostic et thérapie ;

91. considère essentiel de financer des programmes d'information et d'éducation publics ne visant pas, comme cela s'est produit par le passé, à faciliter l'acceptation du génie génétique mais à encourager plutôt le débat public informé ; recommande que ces programmes soient créés en étroite collaboration avec les organisations représentant les handicapés ;

VI. En ce qui concerne la " société européenne du savoir " et un contrôle de l'Union européenne sur l'évolution de la génétique humaine

92. rappelle que les chefs d'État et de gouvernement ont décidé de créer un " espace européen de la recherche ", qui est indissociable de l'étude des modalités de gouvernement pour l'Europe et qui nécessite par conséquent de nouvelles formes de participation à la vie publique, aux divers niveaux de pouvoir et de décision en Europe, fondées sur l'interaction entre les autorités publiques et la société civile ;

93. estime qu'il est par conséquent important de prendre au niveau communautaire des initiatives visant à :

a/ élaborer des principes éthiques fondamentaux en matière de génétique humaine, en étroite coopération avec le groupe européen d'éthique, en tenant compte des travaux du Conseil de l'Europe relatif à l'Euroforum sur la génétique humaine et à l'élaboration du protocole sur la génétique humaine ;

b/ renforcer le débat public en associant patients et personnes handicapées, ainsi que familles, industries, investisseurs, experts en matière d'éthique et grand public ;

c/ garantir une meilleure organisation des liens entre les comités d'éthique existant aux niveaux national et européen ;

d/ promouvoir le rapprochement des activités législatives du Conseil de l'Europe et de l'Union ;

e/ lancer un appel aux chefs d'État et de gouvernement afin d'entreprendre l'élaboration d'une convention internationale en matière de génétique humaine ;

f/ d'atteindre un engagement de transparence de la part des centres de recherche et des entreprises afin de concilier le secret industriel avec la connaissance, par certaines instances, des recherches en cours ;

94. juge indispensable de conférer au Groupe européen d'Ethique un véritable statut interinstitutionnel lui permettant de jouer pleinement son rôle de comité consultatif d'éthique européen, à l'interface des différentes instances communautaires, et capable en outre d'entretenir un dialogue et un réseau permanent d'échanges d'informations avec les instances éthiques nationales de l'UE ou de pays tiers ainsi qu'avec les instances éthiques mises en place au sein d'organisations internationales gouvernementales (comité international de bioéthique de l'UNESCO ou comité de bioéthique du Conseil de l'Europe, par exemple) ;

95. estime que ce forum garantirait échange d'informations et débat public ; grâce à une méthode de travail " intégrée " associant toutes les parties intéressées (scientifiques, industries et organisations non gouvernementales), conjointement au Groupe européen d'éthique et au groupe de haut niveau sur la science de la vie et au Groupe de protection des données à caractère personnel, et grâce aux contacts permanents avec les parlements nationaux de l'Union, ce forum, composé de membres du Parlement européen et de représentants de la Commission et du Conseil, pourrait se réunir deux fois l'an afin d'évaluer l'impact des investissements consacrés à la recherche et d'intervenir, à l'aide de contributions ad hoc qui pourraient être prises en considération par les instances de décision compétentes des institutions en question, sur les problèmes de nature éthique, juridique, économique et sociale qui pourraient surgir ; en ce qui concerne la méthode de travail de ce forum, il faudra veiller à ce qu'il reçoive une aide scientifique financée et bénéficie des standards les plus élevés en matière de transparence et de contrôle parlementaire ;

96. demande aux représentants des États membres et de l'Union européenne d'engager un dialogue international visant à protéger la dignité humaine quant au développement de la biomédecine moderne, et de chercher à cette occasion à influer sur des pays comme la Chine qui tolèrent des pratiques eugéniques ;

97. juge indispensable que le Parlement européen poursuive ses travaux sur la génétique humaine de la manière qu'il jugera adaptée ;

98. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres et des pays candidats à l'adhésion ainsi qu'au Conseil de l'Europe.