Face à l’évolution de l’opinion publique et à la réalité électorale, des voix de plus en plus audibles s’élèvent chez Les Républicains pour rompre avec le « cordon sanitaire » chiraquien, cette règle qui imposait de faire systématiquement barrage au Rassemblement national.
Bruno Retailleau, président du parti, Laurent Wauquiez, président du groupe LR à l’Assemblée nationale, ou encore le maire de Cannes, David Lisnard : trois poids lourds bravent désormais ouvertement la doctrine du « barrage républicain » qui, pendant des décennies, a tenu à l’écart le FN puis le RN. L’idée d’une primaire ouverte intégrant Reconquête!, le parti d’Éric Zemmour, ou la volonté affichée de faire barrage à La France insoumise plutôt qu’au RN témoignent d’un net glissement à droite… de la droite.
Des résistances subsistent, mais elles relèvent souvent de l’opportunisme. Xavier Bertrand, par exemple, tente de se singulariser dans une démarche qui ressemble fort à une ultime tentative de se positionner pour la présidentielle.
La ligne rouge n’est toutefois pas encore franchie. L’exemple de Martine Vassal, candidate de la droite et du centre à Marseille, contrainte de faire marche arrière après avoir évoqué d’éventuels accords avec le RN au second tour, montre qu’il reste du chemin avant d’enterrer définitivement les vieilles lunes chiraquiennes.
Intégrés malgré eux au « socle commun », ce vaste rassemblement du centre-gauche au centre-droit né des déboires électoraux du macronisme finissant, Les Républicains doivent composer avec les lieutenants d’Emmanuel Macron issus du PS (Élisabeth Borne, Gabriel Attal…) qui, eux, restent farouchement attachés au « barrage républicain ».
Les élections municipales de mars 2026 donneront un premier indice sur ce que Les Républicains sont prêts à assumer face au RN… et face à LFI. Viendra ensuite la longue campagne présidentielle. Comme le PS, LR semble aujourd’hui condamné à n’être que le supplétif d’une force plus puissante. Reste à savoir si le parti choisira de s’arrimer au vaisseau bleu marine.
Rien n’est joué : le RN a certes besoin d’une caution « sérieuse » que LR pourrait lui apporter, notamment auprès du patronat, mais il est lui aussi traversé par des courants qui rejettent toute alliance avec la droite traditionnelle.
Quoi qu’il en soit, le tabou du barrage républicain est en train de vaciller. Et avec lui, c’est peut-être toute une époque politique qui se referme.

Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique
