La sortie de l’Union européenne est promue avec ardeur et constance par le camp souverainiste en France. Un temps défendue par le Rassemblement national, l’hypothèse du Frexit effraie cependant et demeure un tabou pour les élites dirigeantes. Au-delà des convictions de chacun sur la question, un divorce avec Bruxelles aura des conséquences connues et délicates mais aussi imprévisibles.
Contributeur net au budget de l’Union européenne, la France donne plus à l’UE qu’elle ne reçoit. Ajoutez à cela les normes en tout genre, les contraintes budgétaires et la laisse budgétaire et vous aurez un tableau pour le moins obscur du pouvoir bruxellois. La perte de souveraineté tant économique que géostratégique est énorme et les décisions sont prises aujourd’hui par une administration homogène encore plus éloignée des Français que ne pourrait l’être l’État central.
La France d’après l’Europe, une grande inconnue
Quitter l’Union peut ainsi paraître séduisant et même légitime. Reste qu’un départ de l’Union européenne doit être envisagé de manière honnête, tout comme les torts de Bruxelles dans la situation de notre pays doivent être envisagés à leur juste niveau. En matière migratoire, la France n’a pas attendu l’Europe pour recourir à des flux massifs de travailleurs bon marché et autres regroupements familiaux ; en matière économique, ce n’est pas la Commission qui nous a imposé Bruno Le Maire pendant sept ans ; enfin, en matière politique, ce sont les Français qui ont élu des présidents européistes, tous, depuis Giscard. Les Français savaient que Nicolas Sarkozy reviendrait sur le référendum sur la Constitution européenne, c’était dans son programme. En élisant deux fois le très européiste Macron, les Français ont encore tranché.
Le tort revient donc aussi à l’électeur, qui dispose d’une part de souveraineté.
L’indépendance pour faire quoi ?
Par ailleurs, les « élites françaises », au niveau de la haute administration, des ministres et même des députés, ont pris le pli de la moindre responsabilité. En confiant les rênes monétaires à Bruxelles ainsi que des pans entiers de ce qui incombait hier au législateur français, le pays a abandonné des compétences et, surtout, a perdu en matière de responsabilités. Si, demain, un homme politique venait à sortir la France du giron bruxellois, il devra avertir que la transition sera douloureuse et que, si l’on peut aisément énumérer les avantages, les inconvénients seront également légion. Il s’agira de renégocier avec nos « ex » partenaires européens, mais aussi de revoir nos relations internationales à l’aune de cette nouvelle donne. Il faudra assumer la pleine responsabilité de choix réellement souverains, car renverser la table n’est pas sans conséquence, comme les cas de Trump et de Milei ont pu récemment l’illustrer.
Le rôle néfaste de l’UE est aujourd’hui incontestable ; en sortir n’assure aucunement de redresser le pays et, surtout, il convient de tenir compte, quoi qu’on en pense, d’une opinion publique largement hostile. Aucun parti d’envergure ne prône aujourd’hui le Frexit, car il effraie, et probablement à juste titre.

Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique
