En suspendant la réforme des retraites sur injonction du Parti socialiste, Sébastien Lecornu a obtenu un sursis à Matignon. En revanche, il brade l’unique réforme d’importance des deux quinquennats Macron. Celui qui s’était fait élire en se vendant comme un réformiste aura été une vaste escroquerie, même pour son propre camp.
Éviter la censure pour ne pas perdre leur siège pour les députés socialistes et LR, éviter une censure pour marquer une petite pause dans la crise institutionnelle. Les « oppositions », comme le président, avaient leurs raisons d’éviter l’éviction de Sébastien Lecornu et une dissolution presque inéluctable. Le statu quo profite en apparence aux socialistes qui arrachent une suspension de la réforme des retraites. Reste qu’ils devront s’assurer que la réforme sera bien mise entre parenthèses et assurer le service après-vente face aux Insoumis très remontés. LR, de son côté, semble s’être embarqué dans une sale affaire. La ligne tenue par Bruno Retailleau et les siens est tout bonnement illisible.
Le RN et LFI semblent, en revanche, sortir renforcés de la séquence, et cela à moindres frais.
La censure, puis la dissolution, n’auraient en revanche rien eu de magique. Il est très peu probable que le RN parvienne à obtenir une majorité absolue, condition sine qua non pour gouverner. Et encore, gouverner en cohabitation avec Emmanuel Macron aurait tout du piège. Le président refuserait de promulguer des textes et se réfugierait derrière le Conseil constitutionnel.
Dans l’immédiat, l’exécutif a sauvé sa tête, mais la clef de voûte de la Ve République demeure le président, et il semble que seule une élection présidentielle pourrait donner une impulsion suffisante à un camp pour remporter nettement des législatives.
La crise institutionnelle semble donc être partie pour durer. Ce sera probablement cela, l’héritage Macron.

Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique
