(source : Economie matin) La France vient d’entrer dans une zone de turbulence inédite. Ce qui se joue sous nos yeux dépasse la simple mécanique des marchés financiers : c’est la crédibilité économique d’un pays tout entier qui vacille. Depuis la démission du Premier ministre, les taux d’emprunt à long terme se sont envolés, révélant une vérité brutale : la dette française n’est plus perçue comme une valeur refuge. Nous faisons face, sans exagération, au risque financier public le plus important jamais connu par la Ve République.
Un choc politique, une onde économique
Les marchés n’ont pas de mémoire, mais ils ont des réflexes.
Lorsque l’incertitude politique s’installe, les investisseurs vendent. Ils ne cherchent ni à comprendre ni à attendre : ils arbitrent.
Or, depuis la démission du chef du gouvernement, c’est précisément ce qui se produit. En l’espace de quelques heures, les taux à dix ans ont bondi, creusant un écart inquiétant avec ceux de l’Allemagne.
Ce « spread » franco-allemand, longtemps contenu par la crédibilité budgétaire française, atteint des niveaux qui rappellent les heures sombres de la crise de la dette européenne.
Cette flambée n’est pas un épiphénomène. Elle traduit une dégradation structurelle de la confiance.
Quand un pays aussi central que la France voit ses taux rejoindre, voire dépasser, ceux de l’Italie, c’est toute la hiérarchie financière de la zone euro qui se trouve bouleversée.
Le prix de l’instabilité
Chaque point de base gagné sur les taux, chaque frémissement de spread, se traduit par des milliards d’euros de charges supplémentaires pour les finances publiques.
La France, déjà engagée sur une trajectoire d’endettement dépassant les 110 % du PIB, ne peut plus se permettre la volatilité politique.
Les agences de notation observent, silencieuses mais attentives. Les investisseurs institutionnels – notamment les fonds de pension étrangers – commencent à réduire leur exposition à la dette française, perçue comme moins sûre, plus imprévisible.
La mécanique est implacable : plus la confiance se détériore, plus le coût de la dette augmente, et plus le budget se fragilise. C’est une spirale auto-entretenue où l’instabilité politique devient un facteur budgétaire.
L’État, qui emprunte chaque semaine des milliards pour financer son fonctionnement, se retrouve désormais à la merci des marchés.
Autrement dit : ce n’est plus la France qui choisit ses taux, mais les marchés qui choisissent leur niveau de confiance dans la France.
