Femmes et famille : pour qui roulent Astrapi et Tralalire ?
Article rédigé par Elizabeth Montfort, le 06 janvier 2006

L'éditeur catholique Bayard sacrifie aux sirènes du "politiquement correct" dans d'étranges proportions. Deux dossiers sur les femmes et la famille viennent en effet de paraître dans des périodiques pour jeunes enfants, spécialité historique du groupe.

Les derniers numéros d'Astrapi (7-11 ans) et de Tralalire (2-5 ans) soulèvent des questions et provoquent notre étonnement.

Astrapi ouvre son numéro 631 du 1er janvier 2006 par un dossier sur l'histoire des droits des femmes depuis 100 ans. Zoé et Léon enquêtent en se rendant près de leur arrière-grand-mère, Mémé Josette, de leur grand-mère, Mamie Christiane et de leur mère, Agnès. "Mais Zoé, pourquoi, Mémé, Mamie et Maman manifestent-elles ?" interroge Léon.

Si Mémé Josette, née en 1918, appartient à la génération qui a pu enfin déposer son bulletin de vote dans l'urne, elle est surtout présentée comme une victime ayant subi l'autorité tyrannique de son mari qui commandait tout. De surcroît, la pauvre n'avait pas accès à "tous ces moyens contraceptifs qui permettent aux couples de choisir le moment où ils vont avoir un enfant !"

Vive les femmes !

On le devine, la grande victoire de Mamie Christiane, née en 1944, sera d'avoir le droit de prendre la pilule "un enfant si je veux, quand je veux"! Les femmes ont enfin accès aux études supérieures mais les hommes sont toujours présentés comme d'affreux tyrans qui continuent de tout commander et de ne rien faire à la maison.

Même si depuis l'époque de Mémé Josette les choses ont bien changé, Agnès, née en 1969, doit, elle, mener de front sa vie professionnelle (elle est pompier) et sa vie familiale ; la conciliation des deux n'est pas toujours facile ! Et les hommes ? Ils ont fait des progrès, nous rassure Astrapi ; mais attention, "en 20 ans, le temps qu'ils consacrent au ménage, n'a augmenté que d'une minute par semaine et par an".

Pour illustrer cette histoire, Astrapi présente aux enfants des figures symboliques de femmes : Simone Veil, Martine Keller, Brigitte Bardot, Claudie Haigneré ainsi que des associations comme le MLF ou "Ni putes ni soumises". Ne pouvait-on attendre d'autres modèles de la part du groupe Bayard ?

Si cette histoire fait ressortir de vrais progrès de la condition des femmes, elle donne à nos enfants une image très négative des relations entre les hommes et les femmes, forcément conflictuelles, relent amer de combats féministes dépassés qui présentent les hommes comme des oppresseurs et les femmes comme de pauvres victimes. En dénonçant de réels abus, cette histoire présente la famille comme une réalité oppressive, obstacle à l'épanouissement personnel. C'est oublier que la famille est d'abord une communauté construite sur un engagement réciproque et libre de deux personnes qui s'aiment !

De plus, la maternité est vécue ici comme une contrainte et seul un vrai travail en dehors de la maison peut enfin permettre à la femme d'être heureuse. Quand Agnès sortira victorieuse de son dernier combat — obtenir des postes importants pour les femmes — vivrons-nous enfin dans "le monde idéal" que nous décrit Astrapi? La mère au foyer, la simple commerçante, artisan ou encore la femme ayant choisi de ne travailler qu'à temps partiel ne peuvent-elles être heureuses ?

La joie du don, de la gratuité, de l'écoute, être de vrais acteurs de la cohésion sociale entre les générations... bonheurs simples et quotidiens pour tant de femmes ne semblent avoir aucun prix aux yeux des journalistes de la presse catholique Bayard (le groupe appartient à la congrégation des assomptionnistes).

Confusion des genres

Avec ce numéro d'Astrapi est offert un mini roman, "Lulu, drôle de fille", véritable apologie de la théorie du gender dont s'inspirent les mouvements féministes radicaux. La maîtresse aidée de Lulu va démontrer à toute la classe que finalement il n'y a pas de différence entre les filles et les garçons, "tout est question de culture... il vaut mieux que chacun fasse ce qui lui plaît, même si cela ne correspond pas encore aux habitudes de son pays ou de sa famille".

Comme nous aurions aimé lire des mots inspirant le respect profond de l'identité de chacun !

Comme nous aurions voulu voir évoquées la complémentarité et la co-responsabilité de l'homme et de la femme au sein du couple, d'abord, puis dans la famille, ensuite et enfin dans la société tout entière !

Toutes les formes d'union se valent-elles ?

Ce choix éditorial de Bayard Jeunesse fait suite à "L'imagier de la famille" paru dans le numéro de décembre de la revue Tralalire destinée à la petite enfance.

Vingt petites vignettes très colorées présentent toutes sortes de familles : nombreuses, peu nombreuses, familles où sont accueillis des enfants adoptés, familles monoparentales, familles "qui ressemblent à leur chien" (sic) et même des familles "où les enfants sont élevés par deux femmes ou deux hommes".

Ces modes de vie commune existent, nous ne le nions pas, mais nous refusons qu'ils soient présentés à nos enfants sur le même plan que la famille nucléaire composée du père, de la mère et des enfants. En niant à l'enfant en bas âge un modèle de structure familiale fondé sur le mariage entre un homme et une femme, il n'a plus les repères dont il a besoin pour construire son identité. La famille, cellule fondatrice de notre société, est mise à mal par une homopropagande de plus en plus envahissante.

Cet imagier, écrit et illustré par Todd Parr (édition originale publiée en anglais en 2003 sous le titre "The Family Book"), est une référence dans les familles LGBT (familles lesbiennes, gays, bi et transsexuelles). Il n'est donc pas étonnant que cette petite histoire soit recommandée par de nombreux sites Internet du lobby homosexuel. Sur le site de "l'alternative au projet de mariage" (www.unmarried.org), les livres de Todd Parr sont présentés comme la Bible de notre famille". Il est bien expliqué sur ce site que "les parents qui veulent enseigner l'acceptation du rôle interchangeable des hommes et des femmes et des différentes orientations sexuelles se sentent souvent marginalisés" et trouvent un soutien dans les œuvres de Todd Parr.

On trouve également Todd Parr sur les sites www.pinkbooks.com, et http://theothermother.typepad.com. L'homme est donc une référence dans les milieux homosexuels militants qui veulent à tout prix faire accepter leurs modes d'union, au risque de déstructurer les enfants.

Il est vraiment incompréhensible de trouver chez Bayard Jeunesse de tels auteurs et très regrettable que ces deux revues ne soient pas à la hauteur de ce que les parents sont en droit d'attendre d'une telle maison d'édition.

 

*Élizabeth Montfort est présidente de Femina Europa.

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