Les infidèles

Chronique d’un carton annoncé… et fabriqué de toute pièce !

D’entrée de jeu, dissipons tout malentendu. Nous avons vu Les infidèles… et nous n’avons pas aimé !

Il n’est nulle question ici d’amoralité, de vertu outragée ou de mauvais goût (bien que ces arguments puissent avoir une certaine pertinence). Indépendamment de tout jugement moral, ce film est un échec, un loupé, un exercice de style auquel manque le style !

La loi des chiffres dément pourtant notre avis : 214 000 entrées dès le premier jour d’exploitation en salles et une première semaine (du 29 au 6 mars) qui dépasse le million de spectateurs. Les infidèles a réalisé le douzième meilleur démarrage de l’année. Un succès prémédité mais au fond très artificiel…

L’effet américain

Ce qui attire en premier lieu dans Les infidèles, c’est sa tête d’affiche où trône Jean Dujardin, premier Français à être distingué aux Oscars dans la catégorie meilleur acteur. Un phénomène made in France devenu international !

Vient ensuite un scandale lié à la promotion du film lui-même. Les affiches – jugées sexistes dit-on – ont été retirée dans toutes les villes de France après avoir été placardée suffisamment longtemps sur les kiosques pour marquer les esprits.

Rien de tel pour assurer la promotion d’un film et provoquer le buzz… tout en passant pour la victime. La côte de popularité des acteurs est ainsi intacte et tout le monde peut se ruer dans les salles dès la sortie du film donnant le succès médiatique et commercial que l’on sait.

De trop bonnes intentions

Qu’est-ce que Les infidèles ? La démarche s’inspire en partie du film Les Monstres de Dino Risi. La comédie du duo Dujardin/Lelouche se rêve satire mordante de la société française et plus particulièrement des hommes (et uniquement les hommes !) qui la composent et qui bien évidemment trompent leurs femmes.

Construit sur le mode du film à sketchs qui avait si bien réussi à Paris je t’aime et était déjà le genre choisi par Risi, le film permet à sept réalisateurs de s’essayer sur le thème de l’Infidélité. On retrouve ainsi derrière la caméra Michel Hazanavicius, Eric Lartigau, Alexandre Courtès, Fred Cavayé, Emmanuelle Bercot, et le duo Jean Dujardin et Gilles Lelouche. Devant la caméra se succèdent également des acteurs qui ne doivent plus faire leurs preuves dans le registre de la comédie (mais pas que) comme Alexandra Lamy, Géraldine Nakache, Guillaume Canet, Sandrine Kiberlain, Manu Payet ou encore Isabelle Nanty.

Une comédie sociologique ratée

Comment alors expliquer l’échec de ce film ? Parce que conjuguer les bonnes intentions (l’enfer en est pavé souvenons-nous en) et les "Artist" ne suffit pas à faire un bon film (ou de l’art si tant est que leurs intentions soient là). C’est peut être en premier lieu ce qu’ont oublié les camarades de jeu, Jean Dujardin (producteur, scénariste, réalisateur, acteur) et Gilles Lelouche (scénariste, réalisateur, acteur).

Au final, malgré quelques scènes très réussies (on pense à La question avec Alexandra Lamy par exemple), de très bons acteurs et des réalisateurs qui maitrisent parfaitement leur art, c’est du côté du sujet et de l’écriture que le bât blesse. L’infidélité valait-elle un film ? Peut-être mais pas un tel film. Ici, l’humour potache est à l’honneur et les courts-métrages enchaînent les clichés. Les scénaristes ne maitrisent pas leur sujet et le film passe, imposant la conviction banale que l’homme qui trompe sa femme est un looser pathétique. L’apport sociologique et la réflexion que Gilles Lelouche et Jean Dujardin annoncent sur les plateaux télé n’est pas au rendez-vous.

La comédie n’offre finalement au duo d’acteur qu’une succession de « petits rôles » de machos immatures à la sentimentalité détraquée et à la sexualité débridée. Une bien triste comédie qui fait naître un malaise : est-ce là la société à laquelle nos artistes veulent contribuer ?