Sainte-Sophie ou l'échec d'Abu-Dhabi

Mgr Nicola Bux, consulteur de la Congrégation pour la doctrine de la foi, de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements et professeur de liturgie et de théologie sacramentaire à l'Institut de théologie de Bari (Italie), revient sur la décision d'Erdogan de transformer à nouveau Sainte-Sophie en mosquée. 

La réaction douloureuse du pape Bergoglio à l'affaire Sainte-Sophie hier, à la fin de l'Angélus, fait ressortir l'embarras et la déception d'avoir considéré la Déclaration d'Abou Dhabi comme une convergence panislamique.

La réaction douloureuse du pape Bergoglio à l'affaire de Sainte-Sophie hier, à la fin de l'Angélus, fait ressortir son embarras et sa déception d'avoir considéré la Déclaration d'Abou Dhabi comme une convergence panislamique. Il en sera de même près de la Tour de Galata, à Istanbul, où des œcuménistes latins, venus d'Occident, toujours prodigues d'idées nouvelles, offrent depuis quelques années l'iftar, c'est-à-dire le repas du soir du mois de Ramadan, au lieu de faire connaître le nom de Jésus-Christ aux nombreux Turcs qui cherchent la vérité et souhaitent être chrétiens. A tel point que les Dominicains et les Franciscains en mission là-bas ont maintenant mis de côté leurs saints fondateurs, qui aspiraient à l'évangélisation et au martyre, et cherchent des convergences parallèles sur le soi-disant "Dieu unique", qui pour les musulmans signifie plutôt la force, la protection et la sécurité : et donc, j'insiste,  sur une idée, et non pas sur une personne.

 Il faut ajouter qu'en Islam, la religion et la politique sont inséparables : tel est le grand oubli de la Déclaration signée par le Pape et l'Imam d'al-Hazar. Sans parler de la concurrence entre eux et l'aspirant sultan Erdogan. Il faudrait aussi sans doute enterrer l'optimisme romantique de la revue de la Conférence Episcopale Italienne (CEI) fin février à Bari dont le titre était : "Frontière méditerranéenne de la paix", si le coronavirus n'avait pas déjà prévu de faire tomber le rideau sur elle. En bref, il s'agit ici d'une Église qui a été envoyée dans le monde par Jésus-Christ pour évangéliser et baptiser toutes les nations, et qui est réduite à une émulation de l'ONU. 

Certains ont même mentionné Sainte-Sophie, comme un monument inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, au lieu de la présenter comme la grande basilique d'où la Beauté et la Sagesse divines rayonnaient sur l'Orient slave. Comme si cette omission pouvait servir à inciter à conseiller les Turcs à plus de "tolérance" .  Le 24 juillet prochain, la ummah (communauté) islamique se réunira à Sainte-Sophie pour la prière musulmane, peut-être dans le silence assourdissant de ceux qui, en Europe, encouragent l'ouverture des mosquées, contrairement à la conférence donnée par Benoît XVI à l'université de Ratisbonne, le 12 septembre 2006, dans laquelle il avait déclaré que la violence est contraire à la raison ! L'absence de raison constitue l'une des pires pathologies de la religion ; au lieu de proposer et de diffuser la foi avec la raison, certains considèrent encore aujourd'hui qu'elle s'impose par la force. 

Ce n'est que lorsque les Églises d'Orient et d'Occident recommenceront à respirer avec leurs deux poumons, comme l'a dit Jean-Paul II, c'est-à-dire pour évangéliser ensemble - il s'agit de leur mission commune - comme l'ont fait les saints Cyrille et Méthode, que le dialogue entre les chrétiens de différentes confessions et entre les hommes et les femmes des différentes religions, qui aspirent à la recherche de la vérité, sera fondé sur des bases réalistes. Jésus-Christ n'a-t-il pas fait cela avec ses contemporains, les appelant à la conversion ? Nous ne sommes pas plus intelligents que Lui.

Source : https://www.lanuovabq.it/it/santa-sofia-fa-emergere-il-fallimento-di-abu-dhabi