Départementales : la déroute des partis de gouvernement

C’est avec beaucoup de soulagement que les commentateurs ont constaté que l’abstention lors du premier tour des élections départementales était « moins forte que prévu ». Les électeurs mobilisés, la France menacée par le Front national pouvait respirer, CQFD. La démonstration a le mérite de la simplicité, mais c'est un double mensonge.

Est-ce la menace proférée par le député écologiste François de Rugy de rendre le vote obligatoire, sous peine d’amende ? Le gouvernement explique, lui, qu’il a réussi son pari : mobiliser les électeurs pour faire « barrage » au Front national. Les chiffres ne parlent-ils pas ? Près de 45% des électeurs sont allés voter, 9% de plus qu’en 2011 !

Pour autant, moins d’un électeur sur deux a voté le 22 mars, et en 2011, le scrutin ne portait que sur la moitié des cantons, ce qui invalide toute espèce de comparaison. La réalité, c'est que la France ne dispose pas d'une force gouvernementale réelle et stable, capable de mobiliser durablement plus de la moitié des Français en âge de voter, chaque grand bloc ne réussissant qu'à réunir péniblement entre 10 à 15 % des électeurs inscrits.

Mensonge sur l’autorité des partis de gouvernement

En agrégeant les alliances, on observe que le parti au pouvoir (PS et assimilés) ne représente que 13,63 % des électeurs inscrits. Sans ses alliés, le PS tombe à 6,34 % (cf. graphique infra) !

Cela démontre l’extrême fragilité du gouvernement, alliance de circonstance se disloquant peu à peu sous les coups de boutoir de la réalité. Les Français en ont sans doute assez d’être gouvernés par des idéologues hystériques qui prétendent changer la civilisation, libérer la jeunesse des conditionnements et sauver les « valeurs de la République » en danger de mort.

Ce sont les partis de gouvernements qui sont en danger de mort. Bien que le parallèle entre le PS et l’UMP soit difficile à établir, les élus locaux de droite étant traditionnellement davantage hors-partis que leurs homologues de gauche, l’UMP seule ne pèse pas lourd non plus : 3,14 + 9,96 %...

Mensonge sur la performance du FN

Quant au Front national, quoi qu’on pense de son programme, sa performance est réelle. Juger ses résultats sur des scénarios cataclysmiques et des hypothèses sondagières est aussi peu scientifique que possible, à moins qu’il s’agisse d'une manipulation ? La réalité est que : 

1/ ce parti progresse à chaque élection, et ce sont les tendances qui comptent ;

2/ cette progression est d’autant plus remarquable qu’elle est portée dans des élections locales par des non-élus, sans capital de notoriété, ou de notabilité.

Enfin, il faut noter que les candidats du FN reflètent une sociologie plus proche de l’ensemble des Français que celle des candidats des partis officiels. Leur seule limite est peut-être qu’ils appartiennent à un parti plus "partisan" que les autres…

Quand un pays n'est pas capable de produire une majorité de gouvernement capable de réunir plus de la moitié des Français autour d'une vision politique cohérente, ce sont les institutions qui préservent l'unité, mais la légitimité de la politique est plus fragile que jamais, et tous les scénarios deviennent possibles : recomposition, révolution... Plus que jamais, c’est à la société civile de se faire entendre.

 

1er tour des élections départementales 2015
RESULTAT EN POURCENTAGE DES INSCRITS : UNE FRANCE SANS MAJORITE REELLE

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Source : Ministère de l'Intérieur
Graphique Liberté politique

 

 

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