Comment le mot « féminicide » nous est imposé

Source [Causeur] « Féminicide » : une notion dans l’air du temps et reprise un peu partout. Quoi de plus normal à l’âge identitaire, où la concurrence victimaire bat son plein ?

A force, nous devrions être habitués : l’extrême-gauche est le festival du néologisme. De la novlangue, pourrions-nous dire avec médisance. Parfois, un mot parvient progressivement à sortir de ces cercles pour pénétrer le discours politico-médiatique : cela a été le destin du mot de « féminicide » ces dernières semaines. Après le « rassemblement contre les féminicides » à Paris le 6 juillet, le mot a, semble-t-il, gagné la partie dans les médias, peut-être après une dépêche AFP l’ayant consacré. En tout cas, France 24, LibérationLe Parisien ou Le Monde l’ont repris en chœur ces derniers jours. Pour nous éclairer sur son sens, Brut a même produit une petite vidéo « pédagogique », comme ils savent si bien le faire.

Qu’est-ce donc qu’un féminicide ? C’est « le meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme », nous est-il régulièrement répété. Le meurtre d’une femme par son conjoint en serait le meilleur exemple : c’est pourquoi on nous parle de 75 « féminicides » depuis le début de l’année, nombre qui correspond à celui de tels meurtres en France. De là le slogan « une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint en France »– ce qui suscite immédiatement l’image du mari coléreux et jaloux battant sa femme à mort. Image qui ne correspond, dans la réalité, pas à tous les cas : le rapport annuel de la Délégation d’aide aux victimes des directions générales de la police nationale et de la gendarmerie nationale, publié le 10 juillet et repris par La Croix, donne les chiffres des meurtres commis au sein du couple en 2018. Sur 149 personnes tuées, 121 sont des femmes et 28 des hommes : la répartition selon le sexe est en effet très claire. Mais le rapport pointe par exemple la montée des meurtres commis par des auteurs de plus de 70 ou 80 ans, au nombre de 46 (sur 149), « dans l’essentiel des cas à l’annonce de la maladie d’un des membres du couple » : de quoi jeter un autre regard sur ces statistiques.

Au contraire, qualifier de « féminicide » le meurtre d’une femme par son conjoint revient à effacer les innombrables problématiques individuelles pour tout regrouper dans une catégorie fallacieuse, celle des femmes tuées « en raison de leur sexe ». C’est bien l’objectif, d’ailleurs, d’une telle appellation : Libération a trouvé la formule : « un fait social plutôt qu’un fait divers ». Selon certaines associations féministes, au nombre desquelles on trouve en première ligne Osez le féminisme, « c’est le machisme qui tue » : le féminicide ne serait que la manifestation ultime d’un « continuum de violences systémiques » organisé par les hommes contre les femmes. Le terme de « féminicide » a été popularisé, nous explique-t-on, par le livre Femicide : Politics of Woman Killing (de Jill Radford et Diana Russell, 1992) ; le féminicide serait donc la manifestation d’une authentique politique de meurtres de femmes.

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