Angela Merkel est-elle respectable?

source[Roland Hureaux]Madame Merkel est-elle respectable?

 

Avant qu’Angela Merkel n’essuie une défaite retentissante au élections allemandes de dimanche dernier - ce qui ne l’empêchera sans doute pas de continuer à gouverner -, la bienpensance internationale ne tarissait pas d’éloges pour elle : Obama, Macron et même le Pape François qui lui envoie des compliments   dans son dernier livre pour avoir accueilli un million de migrants. Il avait même été question un moment de lui décerner le Prix Nobel de la Paix.

Certains émettent, il est vrai,  quelques réserves sur l’opportunité politique de cette admission qui a multiplié les troubles à l’ordre public en Allemagne (alors que le premier devoir d’Etat de la chancelière est de les empêcher), développé des réactions de rejet et, aux dernières élections,  fait entrer Alternative fur Deutschland au Bundestag : nous  ne  le tenons nullement  pour un parti néo-nazi comme le dit une certaine  presse, mais cette entrée en scène n’était sûrement pas le  souhait de la chancelière.

Et ce n’est pas fini : si ce parti n’a obtenu que 13 % de voix, qui sait ce qu’il en sera dans le futur ? La forte minorité musulmane verra son  poids   croître du fait de l’énorme différentiel de fécondité entre autochtones  et immigrés.   Même si les frontières allemandes sont fermées, l’exaspération va monter ; elle pourrait faire advenir au pouvoir un vrai parti d’extrême droite. Nous   connaissons le tempérament bipolaire de nos amis d’outre-Rhin. La constitution de la République de Weimar passait pour la plus démocratique du monde, sa société pour le plus ouverte d’Europe, on connait la suite. Pour toutes ces raisons, certains trouveront la politique d’ouverture d’Angel Merkel quelque peu légère, voire irresponsable.

 

La responsabilité de Merkel dans la guerre de Syrie

 

Mais ce n’est pas de ce point de vue que nous nous plaçons. Au fur et à mesure que les événements de 2015-2016 s’éloignent de nous, nous percevons mieux ce qui s’est passé.

Qui dit refugiés, dit guerre. Nous parlons   de l’horrible guerre de Syrie qui a fait près de 300 000 morts et déplacé la moitié de la population du pays. Or il est notoire   que la Stiftung Wissenschaft und Politik (SWP),  le plus puissant think tank européen, a  participé dès 2005  à la préparation de la guerre contre la Syrie.   Les Allemands  étaient en particulier chargés de développer les contacts avec les islamistes anti-Assad, proches des Frères musulmans syriens dont le siège  est à Aix-la-Chapelle.  Les militaires allemands ne semblent certes pas être intervenus sur le terrain comme les Américains, les Britanniques  et  les Français l’ont fait en envoyant des forces spéciales et en   bombardant,  mais ils ont joué un rôle important dans la formation de miliciens   djihadistes (prétendus démocrates) destinée à déstabiliser le régime du président Assad. Ces formations ont été dispensées  en Turquie, facilitées par les relations anciennes entre Berlin et Ankara.  L’Allemagne a aussi fourni des armes à la rébellion.

Tout cela s’est  certes fait dans le cadre de l’OTAN qui avait distribué les rôles, mais sour le contrôle d’Angela Merkel qui ne pouvait ignorer la responsabilité de son pays dans le déclenchement de la guerre de Syrie.

Continuons : dès lors que les réfugiés ont afflué sur les côtes d’Asie mineure , voulant  pour la  plupart gagner l‘Allemagne, de deux  choses l’une : ou bien  l’Allemagne ne voulait pas les accueillir et il était facile de  demander à Erdogan de les retenir, d’autant qu’il a  reçu 4 milliards de Bruxelles pour cela  ( voire de ne pas les faire venir car ce sont ses services qui , avec la mafia locale,  sont allés les chercher) ; si  l’Allemagne voulait les accueillir et c’est  ce qu’a dit  Mme Merkel  à l’été 2015 ,  alors , il était très facile d’affréter   des charters  à partir d’Ankara et  d’ Istamboul qui ne leur auraient rien ou très  peu coûté  ( prix d’un vol  aller et retour Istamboul-Berlin  : 170 €). Au lieu de cela, on a laissé ces malheureux se saigner aux quatre  veines pour payer les 4000  ou 5000 euros que réclamaient les passeurs, on les a laissé traverser la mer Egée sur des embarcations de fortune et on les a obligés à remonter à pied la péninsule balkanique dans les conditions les plus sordides.  Quelque part Mme Merkel e responsable de la mort du petit Aylan qui avait fait  la une des médias.

Que cette grande humaniste ait obligé les réfugiés à passer par les réseaux mafieux peut s’expliquer de plusieurs manières : a-t-elle été obligée de ménager la mafia turque, très influente dans la communauté turque d’Allemagne ? A tout le moins a-t-elle du ménager son ami Erdogan[1] qui  est proche de cette mafia. Elle a pu aussi penser que la sélection par l’argent     amènerait en Allemagne une main d’œuvre plus éduquée, main d’œuvre que les pays en cause avaient  pris le soin de former  pendant plusieurs années. Tout cela au seul bénéfice de l’industrie allemande ?

 

Roland HUREAUX

[1] Depuis le coup d’Etat de juillet 2016, les relations  entre Merkel et Erdogan se sont  refroidies.