Monseigneur Aillet consacre son diocèse la Sainte Vierge

Source [France Catholique] Entretien avec Monseigneur Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron depuis 2008.

Pourquoi cette consécration de votre diocèse ?

Mgr Marc Aillet : Depuis Jean-Paul II, je suis pétri du Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge, de saint Louis-Marie Grignion de Montfort. Je le lis régulièrement, et depuis que je suis prêtre, je récite tous les jours sa prière de consécration. Dans ce livre, il annonce les derniers temps : il ne s’agit pas de dire c’est maintenant, demain, ou un autre jour… Mais, poursuit Grignion de Montfort, on les reconnaîtra à deux indices : d’abord la Vierge Marie y sera glorifiée, ce qui diffère du premier avènement du Christ, où Marie était en retrait, effacée et humble. Afin que les chrétiens ne soient pas pris au piège de son charme, le seul médiateur étant Jésus-Christ sauveur. Le second indice est que les forces du mal se déchaîneront contre l’église et le monde. Avez-vous remarqué qu’en Russie, Lénine a fomenté sa révolution pendant le temps des apparitions de Fatima ? Octobre 1917 correspond à la dernière apparition, et au déclenchement de la révolution en Russie…

Ensuite, j’ai été frappé par l’exhortation de Jean-Paul II sur l’Europe en 2003 : il avait pris l’Apocalypse comme fil conducteur, pour développer une théologie de l’histoire. Certainement renforcé par sa lecture du troisième secret de Fatima, le pape polonais conclut en exhortant l’Europe à se tourner vers la Vierge Marie, et il termine par le signe de la femme et du dragon, c’est-à-dire du combat contre le mal.

Se consacrer à Marie, à Jésus par Marie, c’est donc bénéficier d’une protection spéciale, et faire partie du petit reste des apôtres des derniers temps, qui vivront la grâce de leur baptême dans une vraie radicalité de la foi.

N’y a-t-il pas un risque de voir le mal partout ?

En 2018, dans le cinquième chapitre de son exhortation apostolique sur la sainteté – que personne n’attendait – le pape François conclut en parlant du combat spirituel contre le démon, qui n’est pas un mythe, dit-il. Cinq ans après son élection, ce pape qui a été élu pour réformer l’église et la Curie, nous dit ainsi que la seule vraie réforme est la sainteté. Que les vrais réformateurs sont les saints.

Un des saints du diocèse, le père Cestac, a eu en 1864 une vision des démons qui se déchaînent dans le monde. Or il avait un lien très particulier avec la Vierge Marie qui lui a inspiré la fameuse prière à "l’Auguste Reine des Cieux et maîtresse des Anges". Il faut prier, disait-il, pour obtenir la protection et la grâce du Seigneur. Vingt ans plus tard, en 1884, Léon XIII a eu une vision de l’enfer et de Satan, qui demandait à Dieu cent ans pour détruire l’église et détourner l’humanité de Lui. C’est pour cette raison qu’il avait instauré la prière à saint Michel Archange après la messe. Je remarque que le pape François a récemment demandé à tous les fidèles de reprendre cette prière, avec l’antienne mariale Sub tuum à la fin de la récitation quotidienne du chapelet. Ce sont des armes spirituelles dont les catholiques doivent user. ça donne du souffle !

Le diocèse de Bayonne a été consacré au Cœur de Jésus ainsi qu’au Cœur immaculé de Marie. Pourquoi ?

La réalité de ce combat eschatologique m’a tellement frappé que quand j’ai écrit ma première lettre pastorale en 2010, j’ai parlé de la consécration aux deux cœurs unis de Jésus et Marie. Ad Jesum per Mariam. Et c’est pourquoi la démarche a été préparée sur un an, par un pèlerinage dans le diocèse des reliques de sainte Marguerite-Marie Alacoque, « l’apôtre du Sacré Cœur ». 
Pourquoi ? Dans le Traité de Grignion de Montfort, il y a quelque chose de plus : selon lui, c’est le Christ qui est rédempteur, mais avec Marie, par une volonté divine. Je ferais donc partie des évêques qui demanderaient que le dogme de Marie Co-Rédemptrice du genre humain soit proclamé et donc qu’elle soit aussi déclarée médiatrice de toutes grâces. Saint Jean-Paul II nous a mis sur la piste avec l’encyclique Redemptoris mater, en 1988. Il parle de cette médiation maternelle, car Jésus, par volonté expresse, a voulu associer la Vierge Marie à la Rédemption.