[Source : Famille Chrétienne]

Pour Magaly Chatin, directrice de la fondation Fourvière, la perte de la couronne de la Vierge, dérobée le 13 mai, à Lyon a une valeur symbolique et sentimentale pour les Lyonnais, bien plus que fiduciaire.

Que s’est-il passé à Fourvière, ce samedi 13 mai ?

Samedi, à 3 h 27, notre musée d’art religieux à Fourvière a été dérobé. La couronne de la Vierge, un anneau et un calice. Le tout pour une valeur d’un million d’euros. Au-delà de cette valeur financière, c’est la valeur symbolique de ces objets qui a été dérobée, non seulement au musée, mais aussi à tous les touristes du monde entier. La couronne de la Vierge, c’est 1791 pierres issues de dons des Lyonnais qui ont apporté leurs pierres, leurs perles, leurs bagues de fiançailles en remerciement à Marie, lors de la guerre de 1870. Lorsqu’elles ont vu leurs frères, leurs hommes, leurs enfants revenir sains et saufs de la guerre. C’est tout cela qui est touché au travers de cet acte douloureux. Les personnes à qui l’on en parle, Lyonnais et non-Lyonnais sont très affectés. Il y a beaucoup de sincérité dans cette douleur. C’est vraiment le symbole très fort de l’attachement très particulier que les Lyonnais ont à Marie et à Notre-Dame de Fourvière.

La couronne de la Vierge, c’est 1791 pierres issues de dons des Lyonnais qui ont apporté leurs pierres, leurs perles, leurs bagues de fiançailles en remerciement à Marie, lors de la guerre de 1870. 

Les catholiques lyonnais cultivent-ils la mémoire de la souscription qui avait été faite pour la fabrication de cette couronne ?

En fait, les dons des pierres ont été faits en remerciement à Marie. Au démarrage, c’était dans un grand élan de générosité pour dire : « Vous allez avec nos pierres, vous, commission Fourvière, les vendre. Elles doivent participer à la construction de la basilique. » Mais il y a eu de tels dons qu’à un moment donné, la commission s’est dit : mais non, on ne va pas les vendre. Ce n’est pas possible. Ces pierres ont donc été mises de côté. Et c’est là que l’idée d’une couronne est née et qu’elle a été fabriquée.

L’orfèvre a compris le projet de l’architecte de la basilique. Il a su le traduire pour en faire une couronne venue justement prendre position au-dessus de la Vierge située dans le chœur central de la basilique. La vierge a été couronnée en 1900 lors d’un congrès marial. C’est un cardinal légat du pape qui était venu à ce couronnement.

Le cardinal Philippe Barbarin a fait un lien entre cette souscription et l’amour des catholiques lyonnais pour la Vierge. Comment une souscription peut-elle signifier l’amour ?

En fait, c’est un élan de générosité venu de toutes parts des Lyonnais, des plus humbles aux plus nantis. C’était un ex-voto. Dire « Merci Marie » d’une belle façon. Dans la beauté, il y a aussi ce qu’on fait de l’argent que l’on a. C’est cela qui est important de retenir. Ça a été un élan massif des familles de toutes conditions qui se sont retrouvées autour d’un vœu : « Si vous nous protégez, vous Marie, de tous les méfaits de la guerre, on tient notre promesse. Et on va vous dresser un site à la mesure de ce que vous êtes. » Il faut imaginer une vague populaire immense. Magnifique.

Bien sûr, ce cambriolage nous meurtrit. Mais moi, ce que j’en dis : on a ici, à Lyon, et au-delà, un lien très particulier avec Marie. Et bien sûr, Notre-Dame de Fourvière est un lieu très particulier. Hé bien justement, renouons cet attachement. Venons à Fourvière. Dans un signe qui nous appartient, suivant les croyances que nous avons. Mais il faut dépasser cet acte-là. En disant que de tels actes ne nous mettront pas par terre. On saura dépasser cela et poursuivre cet élan.

Renouons cet attachement à Notre-Dame de Fourvière. Dans un signe qui nous appartient, suivant les croyances que nous avons. Mais il faut dépasser cet acte-là. En disant que de tels actes ne nous mettront pas par terre. On saura dépasser cela et poursuivre cet élan.

 

Les dons des plus humbles ont-ils aussi servi à la fabrication de la couronne ?

Oui ! Dans les pierres qui sont dans cette couronne. Il y a des perles plus modestes, sans doute. Tout le monde s’y retrouve. Il n’y a pas eu de tri… Si l’on entre dans le détail, il y a des topazes… tout type de pierre qui ont quand même, quoiqu’il arrive, une valeur.

Une valeur sentimentale quand ce n’est pas la valeur du métal ?

Voilà, c’est ça !

D’après vous, les malfrats peuvent-ils avoir eu une idée de la portée de leur geste ?

J’ose imaginer que non ! Sinon, ils ne l’auraient même pas fait. Je pense qu’ils n’ont pas du tout évalué la portée de ces objets-là. Leur dimension symbolique. Leur histoire. De toute la spiritualité embarquée dans ces objets. J’espère qu’avec l’écho qu’en donnera la presse, ils en prendront la mesure et auront des regrets. Peut-être suis-je naïve. Je ne sais pas. Je me dis que ce n’est pas concevable autrement. 

Le cardinal Barbarin a dit qu’il allait prier pour que le Seigneur les touche et qu’il les délivre de leur « fascination pour l’argent. » Est-ce également votre approche ?

Nous nous sommes demandé, à la fondation, si nous allions demander à prier pour ces voleurs. Je trouve que c’est bien que Mgr Philippe Barbarin l’ait dit. Il est dans la position pour le faire. Je crois que, malheureusement, oui. Il y a des biens qui attirent parce qu’il y a le côté vénal des choses. Et on peut se dire qu’il y a de l’argent à en retirer. Mais ils ont complètement occulté l’autre partie. Pour moi, on est tellement dans le sacré que je n’imaginais vraiment pas un tel acte !

Guilhem Dargnies