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J.-L. Clergerie & G.Wasserman,Référendum, les conséquences du non,Ed. d'organisation, 2005, 67 p., 4,66 €

J.-L. Clergerie & G.Wasserman,Référendum, les conséquences du non,Ed. d'organisation, 2005, 67 p., 4,66 €
  • Auteur : J.-L. Clergerie & G.Wasserman
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Le jour d'après

 

Référendum, les conséquences du non

lu par François de acoste Lareymondie

 

 

 

S'IL Y EN A qui avaient pressenti l'exigence d'un débat approfondi et technique sur le projet de traité constitutionnel que les français prennent au sérieux, ce sont bien les éditeurs.

Ils ont répondu à une demande qui n'est guère que le corollaire naturel de la question posée directement au peuple. D'où la floraison de livres à grands tirages constatée depuis 6 mois ; même si la qualité en est inégale, ils remédient au déficit d'explication constaté au niveau officiel.

 

Les éditeurs sont également plus réactifs que bien des politiques, anticipant l'évolution de l'opinion : à preuve ce petit opuscule publié par les Editions d'Organisation sur " les conséquences du non " . C'est bien sur cet aspect critique que se noue à présent le débat et que peut se jouer l'issue du referendum.

 

Deux protagonistes du " non " que tout oppose par ailleurs, ou presque, ont joint leurs réflexions pour esquisser un panorama instructif dans une synthèse qui n'a rien d'artificiel. Ils prouvent incidemment que la diversité de points de vue reprochée aux partisans du " non " ne fait pas obstacle à une convergence constructive.

 

Le premier, déjà connu de nos lecteurs car il a contribué à la rédaction du dossier que notre revue Liberté politique a publié sur les enjeux du traité au mois de mars dernier, est Jean-Louis Clergerie ; titulaire de la chaire Jean-Monnet à l'université de Limoges, il est un spécialiste du droit communautaire. Il montre quelles seraient les conséquences institutionnelles et les options techniques ouvertes aux différents protagonistes.

 

Le second est Gilbert Wasserman, journaliste politique, et rédacteur en chef de la revue Mouvements. Il aborde, en balayant largement tous les aspects politiques, notamment ceux de politique intérieure française, la difficile question des pistes de renégociation qui s'ouvriraient alors, ainsi que les termes et conditions de leur mise en œuvre.

 

L'un et l'autre contribuent ainsi à une démonstration essentielle au débat, sans se laisser intimider par le tintamarre médiatique autour du " chaos " annoncé. Cette démonstration se résume en trois termes.

 

Tout d'abord, sauf à renier l'idée même de démocratie et à bafouer la souveraineté nationale, aucun gouvernement ni aucune institution communautaire ne pourra passer outre une réponse négative. Et comme chaque pays compte quand il faut l'unanimité, a fortiori s'il s'agit d'un pays fondateur de l'Union et plus encore un des grands, nul ne pourrait même envisager de marginaliser l'opposant. Ce qui fait justice de l'idée reçue d'une mise à l'écart de la France.

Ensuite, choc politique ne signifie nullement blocage institutionnel : les institutions actuelles fonctionnent, et continueront de fonctionner. C'est même une des forces du système que de pouvoir digérer les accidents de parcours ; car ce ne serait pas le premier dans l'histoire de la construction européenne. Qu'il s'agisse de l'échec de la CED en 1954, de la politique de la " chaise vide " pratiquée par la France au deuxième semestre de 1965, du rejet du " projet Spinelli " en 1984, ou du " non " danois au traité de Maastricht, à chaque fois, malgré les prédictions catastrophistes entendues auparavant et dont la suite a montré la vanité, une solution opératoire a été trouvée, qui a toujours tenu largement compte des causes du refus, aussi diverses et complexes qu'elles aient été.

 

Enfin, les éléments d'une nouvelle négociation sont tous sur la table : il suffit de savoir regarder et lire, et de vouloir s'en saisir. Bien sûr, ces éléments sont multiples et nécessiteront des choix ; mais ce n'est, après tout, que l'exercice normal des fonctions gouvernementales...

 

L'avenir en effet, n'est pas inscrit dans les astres comme une fatalité sur laquelle nous n'aurions aucune prise. En ce sens, il est normal qu'un plan alternatif ne jaillisse pas tout armé du cerveau d'un quelconque démiurge auquel il suffirait d'acquiescer. En tout état de cause, les options ouvertes seraient nombreuses, tant sur la substance d'un approfondissement de l'Union que sur l'architecture institutionnelle envisageable et sur les modalités de la renégociation. Et contrairement au slogan asséné de toute part, il y aurait réouverture des négociations, ne serait-ce que pour ne pas rester sur un échec.

 

Cependant, il ne faut pas imaginer que le processus démarrerait dès le lundi matin. Tant mieux d'ailleurs. Car c'est probablement en France que le " non " aurait les conséquences les plus importantes ; elles dureraient jusqu'aux échéances de 2007, obligeant les différents partis politiques à faire retour sur eux-mêmes et à afficher leurs options devant les français. Mais pourrait-on imaginer un instant en faire l'économie ?

 

Outre une dédramatisation légitime de l'enjeu, le principal mérite de cet ouvrage simple et didactique, autant que précis et argumenté, est de rappeler que chacun est maître de son destin pourvu qu'il veuille bien faire preuve de raison et de responsabilité.

 

N'est-ce pas l'honneur des hommes libres ?

 

 

 

 

 

(c) Liberté politique.


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