L'affaire Galilée commence avec le chanoine polonais Nicolas Copernic, génie scientifique, passionné d'astronomie et de mathématiques. En 1507 il construit un modèle mathématique de calcul des mouvements planétaires héliocentrique, dans lequel le soleil est immobile au centre de la sphère céleste. Et le fait était là : les astres tournent autour du soleil, et la terre n'est pas le centre du monde.

En 1512, ses travaux circulent. Luther, Calvin et Melanchton fulminent contre ce fou qui bouleverse l'astronomie, alors que le pape Clément VII ne les trouve pas critiquables. De hauts prélats de l'Église l'encouragent à poursuivre ses travaux. Copernic ne fut donc jamais inquiété par les autorités religieuses catholiques. Mieux, en 1543, la grande réforme romaine du calendrier – par le pape Grégoire XIII – utilisa un certain nombre d'éléments formulés dans le livre de Copernic De revolutionibus orbium coelestium, paru en 1543.
Les mensonges de Dan Brown
Dan Brown, qui n'a que faire de la vérité historique, affirme à la page 45 de son livre Anges et Démons (Lattès) que des scientifiques tel Copernic ont été assassinés, supprimés par l'Église .
Selon lui les intellectuels se rallièrent avec enthousiasme. Mais c'est encore le contraire qui est vrai, car cette découverte renversait le système de Ptolémée hérité de l'Antiquité, bousculait les réseaux universitaires internationaux, disqualifiait des bibliothèques entières. Philosophes, théologiens et astronomes s'indignèrent et demandèrent des preuves.
En 1589 cependant, les philosophes scolastiques disciples d'Aristote déclenchent une guerre interne contre Copernic, parce qu'il change l'astronomie. Le cardinal jésuite Robert Bellarmin, qui avait un œil sur l'Inquisition adopte une attitude de grande sagesse (il fut proclamé saint au XXe siècle). Il suggère un compromis tacite. Les scientifiques travailleront comme ils voudront. Quant à l'Église, elle maintiendra la paix en empêchant toute controverse.
Galilée n'aura pas la même sagesse. Il va transformer ce qui aurait du rester un paisible débat en combat ouvert, ce que le discret Copernic n'aurait jamais fait. Galilée fabrique un télescope et se lance dans l'observation astronomique. Il publie ses observations dans un petit ouvrage de cent pages Le Messager des étoiles qui met à bas l'astronomie médiévale héritée de l'Antiquité. Il proclame que Copernic a raison et que le centre du monde est le soleil. Les ennuis n'arrivent pas encore. En 1611, il est nommé premier mathématicien du studium de Pise, premier mathématicien et philosophe du grand-duc de Toscane et est glorieusement admis à l'académie des Lincei, dont font partie les hauts dignitaires de l'Église.
Les Lincei (les Lynx) forment une jeune élite de chercheurs et d'érudits. L'Église ne s'oppose pas du tout à eux : elle les parraine ! C'est avec sa bénédiction que l'académie publie des ouvrages de recherche scientifique et philosophique. Qu'à cela ne tienne, pour Dan Brown, ils constituent le réseau clandestin antichrétien des scientifiques du monde entier (p 201).
Les dominicains de Florence se mobilisent contre Galilée, lequel répond, selon son habitude, par l'attaque avec une rare pugnacité. Rome ne veut pas de cette querelle, mais les adversaires ne désarment pas. En février 1615, le dominicain Lorini dénonce Galilée devant l'Inquisition pour hérésie contre les Saintes Écritures : c'est un échec. Le père Tommaso Caccini monte à nouveau au créneau : nouvel échec.
L'interdiction
Pour faire taire Galilée, on le prend à revers en faisant interdire le système copernicien dont il se réclame. Cette fois, cela va marcher. Le 23 février 1616, le tribunal romain donne en partie raison aux accusateurs. La sentence est validée le 25 février par la Congrégation générale de l'Inquisition. Le 26 février le subtil cardinal Bellarmin convoque Galilée et lui conseille de présenter ses idées comme des hypothèses. Ainsi les attaques tomberont dans le vide.
Pendant sept ans Galilée se conforme à la règle de conduite indiquée par le cardinal Bellarmin. Mais cela ne l'empêche pas d'ouvrir des polémiques sur d'autres fronts, ce qui a pour effet de transformer plusieurs de ses amis en ennemis supplémentaires !
Voyant cela, Galilée s'enferre toujours davantage et se met à dos le Collège romain de la Compagnie de Jésus. Les pères Grassi, Cabeo et Scheiner seront d'intelligents adversaires lorsque reviendra le temps des ennuis pour Galilée.
En 1623 le conclave élit le jeune cardinal Barberini. Ce nouveau pape, Urbain VIII (illustration) est un ami des Lincei et il a soutenu Galilée dans le passé.
Mais Galilée a le génie belliqueux. Il rallume la guerre. Il multiplie les erreurs de jugement et les imprudences en utilisant des preuves fausses pour arriver à des conclusions justes. En 1628, il soumet son ouvrage Dialogue touchant le flux et le reflux de la mer à l'inquisiteur de Florence.
Tout aurait pu tourner à son avantage encore une fois. Galilée soumet sa préface au pape, qui lui donne l'autorisation de publier son Dialogue, à trois conditions : ajouter l'argument de la toute-puissance divine à la fin de l'ouvrage, opérer les modifications demandées par le dominicain Niccolo Riccardi et faire imprimer le livre à Rome.
Au printemps 1631 Galilée reçoit l'imprimatur du père Riccardi. Quinze jours plus tard il obtient une audience d'Urbain VIII qui l'accueille avec de grandes marques d'estime et d'affection .
Provocation
Il n'y aurait plus qu'à porter l'ouvrage à un typographe romain, selon l'accord conclu avec le Vatican.
Mais Galilée n'en fait rien. Il se livre à deux violations et une provocation :

  1. Il quitte Rome et porte l'ouvrage à l'imprimeur Landini à Florence.
  2. Il renonce à titrer sur les marées comme le lui avait demandé Riccardi.
  3. Il choisit un titre provocateur qui rallume la polémique entre les deux systèmes du monde, le ptoléméen et le copernicien. En outre le titre bafoue la sentence de 1616 et le conseil du cardinal Bellarmin, car il évoque les raisons naturelles (objectives) en faveur du système de Copernic. Il n'est donc plus question d' hypothèses , mais de la défense déséquilibrée d'un système contre l'autre. Enfin l'argument du pape sur la toute-puissance divine est rendu ridicule.

En fait Galilée n'a pas résisté à son orgueil intellectuel, parce qu'un esprit supérieur ne se laisse pas faire.
Urbain VIII casse l'imprimatur et ordonne de cesser la diffusion du livre. Ce que Galilée ne sait pas, c'est que la politique étrangère joue un rôle décisif dans cette affaire.
D'ailleurs, il est pris en charge avec de curieux accommodements : il ne va pas en prison, mais dispose d'un appartement confortable. Il est déféré non devant l'Inquisition, mais devant une commission spéciale. La commission est composée de trois experts dans la main du pape, de manière à amener la condamnation voulue, sans rien de trop.
Lorsque la commission rend ses conclusions elle ne retient que la faute contre l'obéissance due au Saint-Père, et non le crime d'hérésie.
Le père Maculano, commissaire général de l'inquisition, rencontre Galilée seul à seul, sans témoin. Le lendemain Galilée exprime sa repentance et accepte tout ce que souhaitent le cardinal Barberini, le père Maculano et le pape Urbain VIII.
Après quoi Galilée reprendra sa vie dans des conditions de confort agréables, d'abord à la villa Médicis, puis à Sienne au palais de l'archevêque. Enfin dans sa villa florentine.
Il meurt le 8 janvier 1642.

 

 

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Sources :

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