Primaire de gauche : quatre grands adolescents

 J'ai un peu écouté le débat du primaire de gauche, surtout pour mieux connaitre les candidats.

Comme beaucoup, j'ai surtout regardé les quatre qui comptent : Hamon, Montebourg, Peillon et Valls. Ils m'ont fait l'effet  d'un quarteron  d'adolescents attardés - Montebourg un peu moins. Ils jouent au grand  jeu du pouvoir, qui n'est pas un jeu. Hollande lui aussi avait un côté adolescent, sinon par le physique, on ne peut plus "normal", du moins par sa voix qui a encore un peu  des accents d'étudiant revendicatif, comme Jospin. 

Ce n'est pas avec cette  touche qu'on pose sa candidature au rôle de père de la nation, ce qu'est toujours un chef d'État, surtout par temps de crise.

Ce style est sans doute la marque du socialisme postmoderne. Jaurès, Blum, Mollet, Mitterrand n'avaient pas l'air d'adolescents.

Il  a un rapport étroit avec l'idéologie. Le parti socialiste est certes moins subversif pour les riches qu'autrefois, s'il l'a jamais été, mais il est plus idéologique que jamais. Il est depuis longtemps dans la logique de  Terra Nova : au diable les ouvriers et même les fonctionnaires, concentrons nous sur les bobos, les minorités sexuelles et les immigrés  (trois catégories qui ne font pas nécessairement bon ménage !). Cela sur la base de l'idéologie libérale -libertaire et déconstructrice. Atlantistes puisque n'étant pas de vrais chefs, il leur est  plus facile de s'aligner sur les "alliés".

L'idéologie : une conception du monde ultra simplifiée et en décalage  avec le réel  et par là avec le  peuple : fondée sur un manichéisme sommaire, elle donne l'air intelligent à ceux qui ne le sont pas. Il n'est pas nécessaire de connaître les questions internationales pour crier stupidement haro sur Poutine,  ni  la démographie pour se boucher le nez dès qu'on parle de famille.  On peut à l'inverse s'extasier devant une éolienne sans rien savoir sur l'énergie. Dans une république idéologique, tout le monde peut avoir un avis  sur tout  - et même devenir ministre. Mais à l'inverse l'idéologie rend bête ceux qui ne l'étaient  pas forcément au départ, par exemple les instigateurs de presque toutes les politiques actuelles : le simplisme idéologique est rarement adaptée à la complexité du réel. On l'a vu avec la politique étrangère de Fabius.

Comme l'avait montré Jean Baechler, l'idéologie est une pensée pour  adolescents  immatures et  elle rend ceux qui s'y livrent immatures.

C'est peut-être ce qui explique l'impuissance de la gauche à se doter de vrai leaders, depuis Mitterrand qui était un cas à part.

 

L'assassinat ne leur fait  pas peur 

Autre remarque: aucun des  candidats n'a dit non, quand on leur a demandé si, devenus présidents, ils ordonneraient des assassinats ciblés pour raison d'État. Ils ont cru bon d'afficher là un cynisme qu'ils imaginent présidentiel. Les adolescents aiment à jouer les durs.

Moi qui ne suis pas de gauche, j'en suis choqué : contrairement  à toutes les calomnies qui ont été déversées sur lui, le général de Gaulle  qui avait une toute autre stature  que ces petits chefs n'a pas ordonné d'assassinats ciblés. Il a parfois refusé de gracier des condamnés à mort, mais ce n'est pas du tout la même  chose et il l'a toujours fait pour des motifs nobles quoi qu'on en dise.  L'attitude de ces candidats vis-à-vis des assassinats extrajudiciaires est particulièrement  choquante venant  d'une mouvance politique qui avait fait de l'état de droit sa Bible et de la suppression de la peine  de mort  son cheval de bataille.

Paradoxe encore : ce parti qui met en avant avec tant d'insistance la parité hommes -femmes na pas trouvé une seule candidate qui tienne la route, Sylvia Pinel  étant manifestement une figurante hors course, et d'ailleurs pas socialiste.

Enfin je noterai que trois des quatre candidats principaux (Montebourg, Hamon et  Peillon) n'avaient pas voulu faire campagne pour  le traité européen en 2005.