La planche à billets ne génère pas d’inflation…

[Source : Boulevard Voltaire]

La planche à billets ne génère pas d’inflation…signe de catastrophe imminente

C’est l’énigme du siècle : les quelque douze billions (mille milliards) de dollars (six fois le PIB de la France) imprimés par les banques centrales depuis la crise de 2008 n’ont pas produit une once d’inflation. C’est une énigme, parce que c’est contraire à une théorie admise depuis deux siècles et parce que personne ne s’accorde sur les explications. Le fait que, sur une relation aussi fondamentale que celle qui relie les prix et la monnaie, les experts soient en plein brouillard est extrêmement angoissant. Le citoyen lambda est aujourd’hui comme le passager d’un avion aux commandes duquel le pilote ne sait plus piloter.

Pourtant, l’explication de ce phénomène est extrêmement simple. Les banques centrales n’impriment pas de la monnaie pour la distribuer directement aux consommateurs mais pour racheter aux banques leurs créances sur l’État. Celles-ci, une fois libérées de ces actifs encombrants, peuvent théoriquement combler le vide ainsi créé par de nouveaux prêts à l’économie réelle. Sauf que les entreprises n’investissent pas et le consommateur ne consomme pas. Pourquoi ? Parce que ni les uns ni les autres n’ont la moindre confiance dans la pérennité de leurs revenus, à commencer par les revenus de l’épargne, qui sont en chute libre du fait, précisément, de cette politique accommodante des banques centrales. En gros, les banques centrales se sont focalisées sur le volet crédit et ont complément oublié le volet épargne. Pour des prétendus experts, chapeau !

Alors, où va l’argent ? Au lendemain de la crise, ces nouvelles liquidités, faute d’irriguer l’économie réelle, se sont dirigées vers le marché financier car la chute des Bourses avait ouvert des opportunités. Aujourd’hui, c’est fini. Ce qui commence à prendre corps depuis deux ans est ce que les économistes redoutent le plus, en quelque sorte l’apocalypse en économie : l’argent disparaît.

L’explication a été théorisée il y a un siècle environ. En voici les tenants et les aboutissants en langage courant.

L’économie est en panne parce que, nous venons de le voir, les agents n’ont plus confiance dans l’avenir. Les bénéfices des entreprises chutent et, pour compenser, on licencie ou bien on baisse les salaires. La trésorerie des entreprises fond comme neige au soleil, de même que l’épargne des ménages avec, pour conséquence, la baisse des dépôts bancaires. Or, qui dit baisse des dépôts dit baisse des crédits et même davantage puisque, traditionnellement, les banques prêtent plus que le montant de leurs dépôts (130 % en moyenne en France). La machine infernale est alors enclenchée. Avec le temps, les anciens crédits ne sont même plus remboursés et c’est la solvabilité des banques qui est remise en question avec, au bout, le spectre d’une ruée des particuliers vers les distributeurs de billets.

Bien évidemment, je ne suis pas le premier à tirer la sonnette d’alarme. Déjà, de très nombreux professionnels demandent aux banques centrales de relever les taux d’intérêt quel que soit l’état de la croissance. Or, celles-ci font la sourde oreille. On identifie deux explications possibles et complémentaires : parce qu’elles ne veulent pas se dédire, parce qu’elles ne croient pas les gouvernements capables de reformes structurelles. Décidément, plus personne ne fait confiance à personne.