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Dans son ouvrage Le Mariage & la loi, publié le 14 janvier, l’Institut Famille et République passe au crible les dérives de la loi du 17 mai 2013 et détaille les pistes juridiques possibles pour aboutir à sa révision.

« Il n’y a aucun obstacle juridique sérieux à une révision de la loi Taubira. » Dans la bouche de Guillaume Drago, président de l’Institut Famille et République, cette affirmation ne fait aucun doute. Son think-tank, composé de cent vingt juristes (avocats, magistrats, hauts fonctionnaires, notaires, universitaires…), vient de publier, dans un ouvrage intitulé Le Mariage & la loi, protéger l’enfant, le résultat de ses deux années de réflexion sur les conséquences de la loi du 17 mai 2013 dit du mariage pour tous, et sur son abrogation effective.

Trente-neuf contributeurs ont participé à l’élaboration de ce livre blanc, construit autour de quatre grandes thématiques : la nécessité de réviser cette loi, la possibilité juridique de le faire, les modalités envisageables d’une telle révision et les solutions alternatives à mettre en œuvre au travers d’une refondation du droit de la famille.

Tirer les enseignements des premières années d’application de la loi

« Nous voulons participer au débat public en tirant les enseignements des deux premières années d’application de cette loi et en dépassionnant le débat », a insisté Guillaume Drago, jeudi 14 janvier au matin, lors de la présentation de cet ouvrage, long de 480 pages, au cœur même de l’Assemblée nationale. « Notre idée de départ a été de nous interroger sur ce qu’est devenu l’enfant, ses droits et ses intérêts, depuis l’adoption de ce texteSa protection a été le fil conducteur de nos réflexions. »

Et force est de constater, pour le think-tank, que la loi Taubira a ouvert « un champ d’insécurité juridique à perte de vue » et brouillé les « repères du droit et de la famille et du couple ». Détournement de l’adoption, contournement de la procréation médicalement assistée (PMA) avec la fabrication d’enfant sans père, reconnaissance rampante de la gestation par autrui (GPA), violations des accords bilatéraux entre la France et des États étrangers concernant les mariages mixtes…

« Deux ans et demi après son adoption, un premier bilan sur cette loi permet de constater que la violation des droits de l’enfant s’est bien réalisée », affirme Aude Mirkovic, maître de conférences en droit privé à l’université d’Évry. Pour toutes ces raisons, « le statu quo est intenable juridiquement », écrit le collectif de juristes.

Notre idée de départ a été de nous interroger sur ce qu’est devenu l’enfant, ses droits et ses intérêts.

Aux défenseurs de la loi Taubira, qui affirment que l’abrogation du mariage pour tous est inenvisageable et impossible, le livre blanc oppose une argumentation juridique détaillée et cohérente. « Les auteurs ont analysé les objections à une révision de la loi et affirment qu’elles sont soit surmontables soit inopérantes », explique Christophe Eoche-Duval, juriste et délégué général de l’Institut.

« Nous voulons dire au législateur que cette loi n’est pas irréversibleajoute Guillaume Drago, professeur à l’université Panthéon-Assas. Comme toute autre loi, la loi du 17 mai 2013 peut être modifiée, révisée ou encore abrogée partiellement ou totalement. » D’autant « qu’aucune exigence constitutionnelle ne l’interdit au législateur ». Le Conseil constitutionnel pourrait toutefois censurer une telle loi d’abrogation. Pour éviter cette hypothèse, l’Institut Famille et République propose de réviser au préalable la Constitution pour y ancrer le principe du mariage comme étant l’union d’un homme et d’une femme ou d’y adosser une charte sur les droits de la famille et de l’enfant, à l’instar de la charte sur l’environnement. Une telle révision constitutionnelle pourrait suivre le chemin habituel du parlement réuni en Congrès, d’un référendum constitutionnel ou, plus audacieux, d’un référendum d’initiative populaire si un mouvement civique ou politique réussissait à réunir un dixième du corps électoral (soit environ 4,6 millions de personnes)…

La révision de la loi Taubira au cœur du débat public

Si abrogation il y a, l’Institut Famille et République n’envisage pas de laisser derrière cette possibilité un champ de ruines. « Tout projet de révision doit s’insérer dans un projet plus vaste sur la place et le rôle de la famille dans la société, ce qui nécessite une reconstruction du droit de la famille. » Si elles n’auront plus vocation à s’appeler « mariage », les autres formes d’unions, y compris entre personne de même sexe, pourront continuer d’exister, précisent les auteurs. Et l’ouvrage de lister différents scenarii envisageables : un retour au Pacs actuel, un Pacs amélioré d’un point de vue patrimonial et fiscal, une union civile qui proposerait un statut amélioré pour les personnes homosexuelles, une union maritale ayant les mêmes effets que le mariage à l’exception de ses effets sur la filiation, ou un pacte de vie commune remplaçant le Pacs.

« Dans tous les cas de figure, insistent les juristes de Famille et République, le mariage et la filiation seront réservés aux couples formés d’un homme et d’une femme, et les personnes de même sexe mariées en vertu de la loi Taubira ne seront pas démariées. »

Un peu plus d’un an avant l’élection présidentielle, l’Institut Famille et République espère ainsi remettre la révision de la loi Taubira au cœur du débat public. L’ouvrage a été adressé à l’ensemble des parlementaires français et aux eurodéputés français, aux responsables des principaux partis politiques et à des acteurs clés de la société civile et religieuse. « Nous avons proposé à chaque responsable de parti de les rencontrer pour recueillir leur avis et essayer, si besoin, de les convaincre », confie Guillaume Drago. En matière familiale, la campagne pour 2017 est donc d’ores et déjà lancée.