Député de Saône-et-Loire, Jean-Marc Nesme lance une Entente parlementaire visant à refuser l'euthanasie et à développer un accès aux soins palliatifs pour tous, une initiative soutenue par la Fondation de Service politique. Quelques jours avant l'examen d'une proposition de loi déposée au Sénat visant à égaliser le suicide assisté , il répond à nos questions. Ces propositions de loi, dit-il, sont autant de messages dramatiques envoyés aux personnes en situation de vulnérabilité.

Liberté politique. — Comment expliquez-vous que la proposition de loi issue des trois textes UMP, socialiste et communiste ait été adoptée par la commission des affaires sociales du Sénat ?
Jean-Marc Nesme. — La mobilisation des membres de cette commission opposés à l'euthanasie était insuffisante. Mais il ne s'agit seulement de la position d'une commission qui n'a pas force de loi. Néanmoins, il s'agit d'une tentative réussie qui est inquiétante. Le vote aura lieu le 25 janvier au Sénat.
Chaque année, des propositions de loi visant à légaliser l'euthanasie sont déposées. Qu'y-a-t-il de nouveau dans ces textes ?
Ce qui est nouveau, c'est que cette dernière proposition de loi qui voudrait donner aux médecins le droit de tuer, intervient après la loi de 2005 Respecter la vie, humaniser la mort dont on pouvait penser qu'elle mettrait fin aux tentatives de ceux qui diffusent une culture de mort . Malheureusement, il n'en est rien, ce qui appelle à une grande vigilance pour l'avenir car d'autres tentatives apparaîtront. Ces tentatives sont autant de messages dramatiques envoyés aux personnes en situation de vulnérabilité.
Sommes-nous condamnés à choisir entre la souffrance en fin de vie et l'euthanasie ?
Non car la loi de 2005 défend et met en œuvre une culture palliative destinée, par des soins appropriés, à tuer les causes de la demande de mort alors que l'euthanasie, c'est tuer le malade.
Le texte de la commission du Sénat ressemble à la législation belge et hollandaise. Si ce texte devenait loi, ce sont 10 000 personnes qui, en France, seraient euthanasiées chaque année. Le comité des droits de l'homme de l'ONU a condamné la législation belge et hollandaise dont les dérives sont extraordinairement dangereuses.
Les responsables politiques ne devraient-ils pas encourager la connaissance de la loi Fin de vie et droits des malades de 2005 qui refuse tout acharnement thérapeutique et fait du soulagement de la douleur un impératif éthique ?
Le gouvernement s'est engagé dans cette voie en augmentant fortement les crédits destinés à la formation des soignants et à créer des lits palliatifs en établissements et des équipes mobiles. Compte-tenu du retard à rattraper, il faudra encore quelques années pour connaître une situation satisfaisante sur tout le territoire national. Les soins palliatifs font partie, maintenant, d'un module de formation en faculté.
Que pensez-vous du sondage Opinion Way qui montre pour la première fois que 60 % des Français privilégient le développement des soins palliatifs plutôt que la légalisation de l'euthanasie ?
Nos compatriotes ont le sentiment que l'acte euthanasique pourrait devenir une variable d'ajustement des dépenses de santé et une cause de déviance à des fins plus ou moins inavouables.
Ce sondage montre d'ailleurs que 73 % des personnes âgées sont hostiles à l'euthanasie. À l'heure où le gouvernement affronte le problème de la dépendance, n'est-ce pas un chiffre qui encourage les pouvoirs publics à construire une société plus solidaire ?

Une société s'honore lorsqu'elle respecte la personne humaine et notamment la plus vulnérable, les sans voix , du commencement jusqu'à la fin naturelle. Le vaste et complexe chantier de la dépendance ouvert par le gouvernement est la suite logique de la loi de 2005. J'appelle à la mobilisation pour défendre les valeurs fondamentales attachées à la dignité de la personne humaine face aux pressions de l'utilitarisme.

 

*Jean-Marc Nesme est député-maire de Paray-le-Monial.

Pour en savoir plus
Euthanasie : la liberté bafouée, la dignité instrumentalisée, par Pierre-Olivier Arduin (14 janvier 2011)

Pour agir

Demandez à vos élus d'adhérer à l'Entente parlementaire
Écrivez à Gérard Larcher, président du Sénat
> Moi, personnellement, a confié le président du Sénat, je ne voterai pas un tel texte, qui arrave alors qu'on n'a pas encore mis en oeuvre la loi Leonetti de 2005. Le président de la Haute Assemblée doit s'engager non seulement personnellement, mais aussi politiquement : g.larcher@senat.fr
Écrivez à Gérard Longuet, président du groupe UMP au Sénat
> Le sénateur de la Meuse a jugé souhaitable de voter contre ce texte . Le président du groupe UMP doit engager son autorité auprès des sénateurs de son groupe pour qu'ils votent tous de manière cohérente avec leur vote de 2005 : g.longuet@senat.fr

 

 

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