Eric Ciotti : «Des mesures chocs s’imposent pour enrayer la tragédie»

Source [Le Figaro] Pour surmonter la crise, «il faut arrêter avec les demi-mesures», selon le député des Alpes-Maritimes Éric Ciotti

LE FIGARO. - La France vous semble-t-elle bien armée pour affronter ce «présent redoutable» appelé à «durer» dont parle Édouard Philippe ?

Éric CIOTTI.- Hélas, non. En permanence depuis le début de cette crise en janvier, nous affichons systématiquement un temps de retard sur les événements si bien que la France s’est retrouvée dans un état d’impréparation manifeste face à l’épidémie. Aujourd’hui, l’heure est bien sûr à la mobilisation générale mais il faut tirer très vite toutes les conséquences des multiples erreurs de ces dernières semaines pour éviter de les reproduire. «Gouverner c’est prévoir et ne rien prévoir, c’est courir à sa perte», écrivait Émile de Girardin. Malheureusement, force est de constater, qu’aucune prévision n’a été à la hauteur des enjeux: pas de stratégie de dépistage systématique, des tests absents dans la plupart des hôpitaux jusqu’à la semaine dernière, mise à l’écart des médecins libéraux au début de la crise, ouverture des frontières à tous les vents, absence cruelle de masques de protection, faiblesse de nos capacités hospitalières… On ne peut ignorer ces failles béantes qui marquent la gestion de la crise.

Le premier ministre assure pourtant que la décision politique s’est adaptée au fil des éclairages scientifiques…

Nous jugerons les erreurs d’appréciation avec le temps mais ce qui me frappe c’est l’abondance de communication contradictoire et la faiblesse des actions. Le «en même temps», qui a marqué chaque décision est moins que jamais adapté en période de crise. On met en œuvre le confinement mais on refuse de prononcer le mot, on impose des mesures de restriction mais le sport est autorisé, on incite à rester chez soi mais on demande de travailler… Il faut arrêter avec les demi-mesures. Des mesures chocs s’imposent si l’on veut encore avoir une chance d’enrayer la tragédie qui s’annonce. Il faut changer de braquet pour combattre cette crise et ne plus se cacher derrière les mots mais agir sans faiblesse.

Le confinement est la seule solution puisque nous n’avons pas su mettre en ­place des tests systématiques et généra­lisés comme l’ont fait l’Allemagne et la Corée du Sud

Quelles mesures réclamez-vous pour consolider le confinement ?

Nous savons hélas que le confinement est la seule solution puisque nous n’avons pas su mettre en place des tests systématiques et généralisés comme l’ont fait l’Allemagne et la Corée du Sud. En Allemagne avec deux fois plus de cas déclarés il y a dix fois moins de morts, sans doute parce que les Allemands ont testé dix fois plus. Au cours de cette semaine, le confinement a été très mal géré. Il existe des quartiers entiers où il ne s’applique pas, par crainte de soulever des émeutes urbaines. Des mesures beaucoup plus coercitives s’imposent. Je demande le déploiement de l’armée dans ces quartiers. Toutes les mesures, y compris celle du couvre-feu, doivent être mises en œuvre partout où la République est contestée.

Le ministre Castaner a salué le couvre-feu voulu à Nice mais sans juger nécessaire de la généraliser. Qu’en pensez-vous ?

Les maires ont pris des décisions que l’État refuse de prendre. Moi, je souhaite que le confinement s’applique mais pour cela, il faut limiter tous les motifs de déplacements aux seules personnes exerçant une profession d’intérêt vital pour la nation. Cette liste doit être définie très vite et validée par les préfets, avec le concours des maires.

Pourquoi voyez-vous une urgence sécuritaire couplée à l’urgence sanitaire ?

Les menaces sont très fortes. Les tensions montent partout dans les quartiers, comme dans les établissements pénitentiaires. Certains pourraient profiter de la situation pour se livrer à des pillages ou à des exactions. L’État islamique a également lancé un message pour profiter des circonstances et nous frapper. Avec une immense inquiétude, je constate que des centres de rétention administrative, qui abritaient des étrangers sortant de prison et en voie d’expulsion, sont en train de fermer. Des centaines d’individus potentiellement dangereux sont libérés, y compris dans nos prisons. Baisser la garde dans cette période serait suicidaire. Il faut donner à nos policiers et gendarmes les moyens de travailler en sécurité. Le fait qu’ils ne disposent pas de masques est une honte absolue. Plus d’une centaine sont touchés par le virus et 5000 ont été confinés. Si nous ne disposons plus de l’engagement de nos forces de l’ordre, plus rien ne tiendra dans ce pays !

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