"Affaire classée." Pour le ministre de l'Éducation nationale, Gilles de Robien, le débat est clos, les spécialistes se sont prononcés, l'Inspection générale a avalisé l'abandon des méthodes d'apprentissage de la lecture dites "globales", et le ministre se dit "confiant dans les enseignants qui appliqueront les programmes" (Le Monde, 29 août).

Mais les principaux syndicats ne l'entendent pas ainsi : les modifications introduites dans les programmes par un arrêté du 24 mars 2006 "ne changent pas grand-chose aux textes précédents ni aux pratiques des enseignants, affirme Luc Bérille, secrétaire général du SE-UNSA. Les enseignants vont continuer à faire leur boulot, en travaillant à la fois sur le décodage et le sens des mots." Bref, tout change pour que rien ne change.

Aux parents qui ne savent plus qui croire, voici les conseils du Dr Wettstein-Badour, médecin spécialisé dans l'accompagnement d'enfants d'âge scolaire en difficulté, et auteur de Bien parler, bien lire, bien écrire (Eyrolles, 2005).

P:first-letter {font-size: 300%;font-weight: bold;color :#CC3300; float: left }LES INITIATIVES avortées de Gilles de Robien pour supprimer toutes formes de méthode globale ont laissé des traces dans l'opinion, mais il ne faut pas s'y tromper : une campagne de désinformation s'est mise en place qui peut tromper les parents. Il suffit de voir par exemple les sites des éditeurs comme Hatier ou Nathan qui ne distribuent pas moins de quatre méthodes chacun, toutes à départ global comme le savent tous ceux qui connaissent le dossier, mais qui toutes sont devenues du jour au lendemain plus du tout globales et très très syllabiques (ils emploient même le mot "syllabique", utilisé à tort par le ministre au lieu d'"alphabétique"). Les enseignants disposent ainsi d'un argumentaire pour leurs réunions de classes de début d'année.

Il faut par ailleurs avoir à l'esprit la grande consanguinité entre les éditeurs/auteurs de méthodes et la haute hiérarchie de l'Éducation nationale (Alain Bentollila, aujourd'hui directeur du secteur scolaire chez Nathan a été le conseiller de quatre ministres, MM. Bayrou, Allègre, Lang et Fillon, et demeure bien en cour : Gilles de Robien lui a demandé de prendre la parole lors de son séminaire du 9 mars sur l'apprentissage de la lecture ; des inspecteurs généraux comme J.-E. Gombert ou G. Chauveau sont également coauteurs de méthodes bien connues). Il y a donc gros à parier que ce petit monde donnera à ses troupes les consignes nécessaires pour "noyer le poisson" car il s'attend, particulièrement cette année, à des questions de parents ayant pris pour argent comptant les propos du ministre.

Il semble donc tout à fait prioritaire d'alerter les parents pour qu'ils ne se leurrent pas, car même les plus attentifs peuvent avoir des graves soucis avec tel ou tel de leurs enfants et ce dès la petite section de maternelle.

CONSEILS AUX PARENTS D'ELEVES DE CP-Cours préparatoire

■ Surtout ne pas "croiser le fer" avec les enseignants : ce serait user son énergie pour rien tout en créant un climat détestable avec des personnes qui, pour la plupart, sont respectables et dévouées, convaincues de bien faire en suivant scrupuleusement les instructions et les arguments que leur donne leur hiérarchie. (Ne pas oublier que les enseignants peuvent à bon droit dire aux parents que les instructions officielles leur interdit d'utiliser des méthodes alphabétiques !)

■ Recueillir le maximum d'informations sur les supports de lecture/écriture utilisés (cahiers d'exercices, albums ou autres), ne pas se contenter des "paroles verbales" des maîtres qui sont toujours très lénifiantes et comparer les supports utilisés eux-mêmes avec le tableau ci-dessous*. Ceci permettra de savoir exactement quel type de pédagogie est proposé à leur enfant (publication autorisée) :

METHODES D'APPRENTISSAGE DE LA LECTURE ET DE L'ECRITURE

Principales caractéristiques et différencesMéthodes semi-globales, mixtes, naturelles, par hypothèsesMéthodes alphabétiques

Découverte implicite du code alphabétique

Textes ou phrases dès les premières pages du livre

Mots-outils isolés dans la phrase, séparés du texte

Ces mots doivent être appris et "reconnus" dans d'autres phrases

Introduction de nouveaux mots- outils choisis selon les besoins des phrases

Présence de graphèmes à retenir dans chaque leçon

Pas de logique dans l'introduction des graphèmes

Découverte du sens des mots par formulation d'"hypothèses de sens"

Graphèmes mélangés à d'autres, inconnus à ce moment de l'apprentissage, favorisant également la lecture " par hypothèses"

Introduction d'un graphème avec des signes graphiques qui en modifient le sens phonologique.

Par exemple : a, au, aux, an, eau, eaux

Apprentissage explicite du code alphabétique

Apprentissage commençant par les voyelles (y compris les accents)

Introduction des consonnes une par une.

Choix de la progression étudié pour permettre de lire très rapidement des mots et des phrases

Mots et phrases uniquement composés avec les graphèmes connus et ceux qu'on apprend

Les acquisitions mettent en jeu la connaissance du lien entre phonèmes et graphème.

Pas de mémorisation de la forme du mot

Aucun mot n'est appris " par cœur".

Aucune hypothèse de sens n'est tolérée

La progression se fait sur des acquis solides et permet de revoir sans cesse les différentes combinaisons phonologiques

Utilisation du graphème étudié dans des mots dont les autres graphèmes sont connus ;

élimination des mots dans lesquels le graphème est associé à d'autres graphèmes qui en modifient le sens phonologique

*Source : G. Wettstein-Badour, Bien parler, bien lire, bien écrire, Eyrolles, 2005, p. 95-96

 

■ En cas d'échec :Prendre l'initiative. Si, à la Toussaint (et au plus tard à Noël) votre enfant ne s'adapte pas à la pédagogie qui lui est proposée (environ 40% de la population est dans ce cas et ce n'est pas une question d'intelligence), prendre en main son apprentissage de la lecture avec une méthode alphabétique.

Consultez votre propre médecin. En cas de difficulté de l'enfant, ne pas se laisser embarquer sans consulter votre médecin dans une médicalisation anormale conseillée bien trop souvent par les enseignants (orthophonistes, psychologues scolaire voir psychiatres) lorsque le "déclic" comme ils disent ne se produit pas.

Ne pas rester seul. Ne pas penser pas que votre enfant est anormal s'il ne parvient pas à réussir comme d'autres en lecture : oser en parler autour de vous (vous constaterez ne pas être les seuls et cela vous aidera à trouver des solutions).

CONSEILS AUX PARENTS D'ELEVES DE MATERNELLE

 

■ N'attendez pas. Pour éviter toute mauvaise surprise, prenez en main vous-mêmes l'apprentissage de la lecture et de l'écriture dès que votre enfant est demandeur (il n'y a pas d'âge théorique, chaque enfant est un cas particulier).

■ Respectez le rythme de l'enfant. Seule précaution à prendre : la durée quotidienne de travail doit être d'autant plus faible que l'on commence tôt (de l'ordre de 10 minutes à 4 ans, autour de 20 minutes, en tout cas pas plus d'une demi-heure à 5/6 ans).

Il faut en effet avoir en tête que depuis les programmes de 2002, la grande section de maternelle est la première année du cycle 2 qui en compte 3 (grande section, CP, CE1) au cours de laquelle on commence l'apprentissage de la lecture. En fait dès la moyenne section et depuis peu dès la petite on plonge les enfants "dans un bain de mots" et cela commence pratiquement dès les premiers jours par les prénoms à "reconnaître" sur des étiquettes... etc. et les ennuis commencent. Si en primaire on est en mixte, en maternelle on est en globale pure (cela a dû complètement échapper au ministre qui ne s'en est nullement préoccupé !).

 

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